samedi, mai 31, 2008

Au Maroc, en Tunisie et en Libye aussi...

Des pays voisins de l'Algérie sont eux aussi confrontés au problème des harragas, mais dans une mesure moindre. Au Maroc, le phénomène a beaucoup baissé ces dernières années, la lutte maritime contre l'émigration clandestine s'étant considérablement renforcée. Jusqu'à la fin des années 1990, les ressortissants marocains partaient de Nador, au nord, tandis que les Sahraouis et les Subsahariens partaient de Tarfaya, El-Ayoun ou Dakhla, sur la côte atlantique sud. Les Marocains l'emportaient largement, en nombre, sur les Subsahariens, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.

La fermeture hermétique, à partir d'octobre 2005, des enclaves espagnoles de Ceuta et de Melilla - après qu'elles eurent été prises d'assaut par des centaines de Subsahariens désespérés - a fait chuter d'environ 70 % le nombre des candidats au départ. Reste des tragédies comme celle du 29 avril, où 29 clandestins (des Africains pour l'essentiel) ont péri dans des circonstances controversées, l'ONG « Amis et familles des victimes de l'immigration clandestine » accusant l'armée marocaine d'avoir provoqué leur noyade.

En Tunisie, les candidats à l'exil sont nombreux à tenter leur chance depuis les villes du Sahel (Sousse, Sfax, Monastir). Pas de données officielles, mais les habitants des localités côtières (Teboulba et Chebba notamment) signalent régulièrement des barques vides dans les eaux tunisiennes, avec à leur bord des vêtements, des papiers d'identité et de l'argent. Il s'agit non seulement de Maghrébins mais aussi de Subsahariens. Le 10 mai, une cérémonie d'hommage à ces disparus, intitulée « Les Embarcations de la dignité », a même été organisée à Ksiebet El-Mediouni.

Avec ses 1 700 km de rivages, la Libye est à la fois une terre d'accueil et de transit. Elle est même considérée par l'Europe comme la plaque tournante de l'immigration clandestine. Il faut dire que la petite île italienne de Lampedusa n'est qu'à 300 km de Tripoli, à vol d'oiseau.

Sur un total de 5,5 millions d'habitants, la Libye compte quelque 1,7 million d'immigrés, clandestins pour la plupart. Les autorités libyennes tentent de répondre aux demandes des Européens et de contenir au sud ces « indésirables » en leur interdisant l'accès de Tripoli et de la côte méditerranéenne.

On ne compte pas de Libyens parmi les candidats au départ : la Libye est même le seul pays de la région qui réussit à garder ses enfants ou à les faire revenir. Les jeunes Libyens obtiennent du coup facilement des visas pour l'Europe, à l'inverse de leurs frères maghrébins.

Source : Le Monde du 17.05.08

1931, les étrangers au temps de l'Exposition coloniale

Colonies et émigrés de 1931
LE MONDE | 28.05.08

A Paris, la Cité de l'immigration fait revivre les coulisses de l'exposition coloniale de 1931.

Le 15 novembre 1931, au coeur du bois de Vincennes, à Paris, devant près de 400 000 personnes, les couleurs étaient amenées pour la dernière fois au sommet d'une éphémère tour de bronze de 82 mètres. L'Exposition coloniale s'achevait sur une note à la mesure de son triomphe.

En six mois, pas moins de 8 millions de visiteurs avaient entrepris "le tour du monde en un jour" vanté par les organisateurs. Ils y avaient découvert les piroguiers du Dahomey, les danseuses de Bali, les musiciens des Antilles et les comédiens malgaches. Ils avaient arpenté les dizaines de pavillons, jubilé devant les reproductions grandeur nature du temple d'Angkor Vat ou d'un palais de Tombouctou. Ils avaient rempli théâtres, concerts et cafés, observé jusqu'à minuit fontaines lumineuses et spectacles pyrotechniques.


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Un succès populaire doublé d'une réussite financière : 33 millions de francs de bénéfice sur 320 millions de francs de budget. L'opération marquait en outre durablement le Sud-Est parisien : le métro était prolongé, les boulevards extérieurs élargis, le bois transformé.

Pour sa première grande exposition temporaire, la Cité nationale de l'histoire de l'immigration a choisi de faire revivre cette scène exceptionnelle. Installée depuis septembre 2007 au palais de la porte Dorée, dernier vestige de la fameuse exposition, la Cité y présente, dans toute sa brutalité, cette célébration de l'oeuvre coloniale.

A peine l'entrée franchie, une carte du monde, peinte par Henri Milleret et exposée au pavillon des armées, plante le décor : "C'est avec 76 900 hommes que la France assure la paix et les bienfaits de la civilisation à ses 60 millions d'habitants." Frises, fresques, tableaux, sculptures, photos, affiches, cartes postales, journaux, costumes et maquettes, souvent sortis pour la première fois des réserves du Musée du quai Branly, nourrissent la reconstitution. Faute de volume approprié, on devine l'ampleur plus qu'on ne la ressent. Mais là n'est pas l'essentiel.


6,9 % DE LA POPULATION


Derrière la scène, ce sont les coulisses, et derrière le théâtre, le monde réel que l'exposition "1931, les étrangers au temps de l'Exposition coloniale" entreprend de faire apparaître. Un monde fragilisé par le krach de 1929. Un monde de tensions et de premiers craquements. 1931 marque en effet l'apogée de la présence étrangère en France. Ils sont alors 2,8 millions, dont 800 000 Italiens, soit 6,9 % de la population métropolitaine : mineurs, ouvriers, paysans. Loin du tintamarre de l'événement, leur présence s'est imposée, avant, pendant et après la première guerre mondiale, silencieuse et massive. Au travail, d'abord, mais aussi dans les loisirs, le logement, la culture.

Colonisation, immigration : tout le parti pris de l'exposition tient précisément dans ce souci de faire résonner les deux phénomènes. Là-bas, dans ces terres d'outre-mer, où se côtoient Français, étrangers et surtout "indigènes" privés de droits. Ici, où cohabitent travailleurs, non-travailleurs et réfugiés. La prétendue mission civilisatrice glorifiée par les oeuvres d'art et les plans somptueux, d'un côté ; les images et objets du quotidien, de l'autre, à commencer par cette mosaïque de papiers d'identité : visages anonymes, inconnus, au milieu desquels apparaît un jeune Espagnol sans moustaches nommé Salvador Dali.

Immigration de travail, immigration politique et même immigration de transit, vers les Etats-Unis ou l'Amérique du Sud : l'exposition s'emploie à incarner la complexité du phénomène. Dans les mines, Français et étrangers luttent côte à côte, mais ailleurs se multiplient les manifestations xénophobes ou antisémites. La presse livre ici son habituel et efficace témoignage. Plus édifiant, la Cité expose les travaux "scientifiques" de Georges Mauco et sa thèse sur le degré d'assimilabilité des différentes "races". Dix ans plus tard, le régime de Vichy saura en faire usage.

Pour l'heure, nous sommes encore en 1931. Dans les allées du bois, éléphants et dromadaires éblouissent un petit garçon nommé François Cavanna. L'écrivain en livre le témoignage sonore. A quelques centaines de mètres, dans le 12e arrondissement, un immeuble poursuit sa vie de tous les jours. Une grande installation reconstitue les appartements, étage par étage. De haut en bas : une cuisinière française ; un manoeuvre algérien ; un maçon italien ; une blanchisseuse, un employé d'hôtel et un employé du gaz, tous français ; un marchand ambulant chinois ; un manoeuvre, chinois encore... On rêve de les entendre se parler, s'interpeller, ou plaisanter "Va donc, indigène ! - Chez toi, étranger !"

Lors de son inauguration, l'an dernier, la Cité de l'histoire de l'immigration s'était vu reprocher de ne pas lier l'immigration au fait colonial et à ses conséquences. Huit mois plus tard, elle a trouvé la meilleure réponse possible : une très belle exposition.


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"1931, les étrangers au temps de l'Exposition coloniale." Jusqu'au 7 septembre. Cité nationale de l'histoire de l'immigration, 293, avenue Daumesnil, Paris-12e. Tél. : 01-53-59-58-60.

Un "pacte européen pour l'immigration" proposé par la France

Hortefeux propose un "pacte pour l'immigration"
NOUVELOBS.COM | 31.05.2008

Le document de travail du ministre de l'Immigration, qui a pour objectif d'harmoniser les politiques européennes, entend notamment instaurer au niveau communautaire l'expulsion des migrants illégaux, un droit d'asile, et promouvoir l'immigration professionnelle légale.

Brice Hortefeux, le ministre de l'Immigration, a présenté à ses homologues de l'Union Européenne un document de travail visant à sceller un "pacte pour l'immigration" européen, indique vendredi 30 mai Le Figaro. Ils devraient en discuter le 7 juillet à Cannes, lors d'un conseil informel des ministres de l'Immigration, dans le cadre de la présidence française de l'Union Européenne qui débutera le 1er juillet.

Le texte repose sur la conception que "le flux migratoire doit impérativement s'adapter aux capacités d'accueil de l'Europe, sur le plan du marché du travail, du logement, des services sanitaires, scolaires et sociaux".

Expulsion et asile

Composé de cinq chapitres, il a pour objectif d'harmoniser les politiques européennes. Les deux premiers développent un volet sécuritaire. Brice Hortefeux souhaite une Europe qui fasse "respecter sur l'ensemble de son espace, la règle selon laquelle un migrant en situation irrégulière a vocation, soit à partir volontairement, soit à être reconduit dans son pays".
Un troisième chapitre vise à "bâtir une Europe de l'asile", qui pourrait se heurter à des réticences de la part de certains partenaires. Le document propose d'instaurer d'ici 2010 "des garanties communes en matière d'asile et un statut de réfugié uniforme".

Un quatrième veut promouvoir l'immigration professionnelle légale, où chaque Etat membre conserverait la liberté de définir ses besoins. Dans le cadre de la présidence française de l'Union Européenne, Nicolas Sarkozy souhaite également l'adoption d'une directive instaurant une "carte bleue", sur le même modèle de la carte verte américaine. Il s'agit d'une autorisation de travail pour les immigrés hautement qualifié.

Le document stipule également que les pays doivent dispenser des cours de langues et définir un contrat d'intégration qui impliquerait "l'apprentissage des identités nationales et des valeurs européennes".

Un cinquième chapitre, moins fourni, met l'accent sur la nécessité de promouvoir la coopération économique avec les pays d'origine.

lundi, mai 26, 2008

L'ambassadeur du Mali juge « légitime » la revendication de régularisation

Depuis le 15 avril , près de 1 000 travailleurs sans papiers se sont mis en grève en Ile-de-France pour réclamer leur régularisation. Selon la CGT, qui soutient leur action, 70 % d'entre eux sont maliens. Dans un entretien au Monde, Mohamed Salia Sokona, ambassadeur du Mali à Paris, demande à la France d'être « humaine » dans le traitement des dossiers de ses ressortissants.

Comment percevez-vous le mouvement des travailleurs sans papiers ?

Je ne peux pas rester indifférent face à une telle situation. Il y a des gens qui ont du travail et qui veulent sortir de cette situation inconfortable. Nous sommes très solidaires de leur revendication légitime, qui est la régularisation. Nous ne demandons pas l'impossible.

Le gouvernement français s'est dit prêt à régulariser « au cas par cas ». Le regrettez-vous ?

L'essentiel pour nous, c'est que le gouvernement français puisse examiner les dossiers avec un côté humanitaire : c'est quelque chose qu'on pourrait saluer.

C'est ce qui pourrait vous inciter à signer les « accords de gestion concertée des flux migratoires » avec Brice Hortefeux, ministre de l'immigration ?

Nous sommes en pleine négociation. Il n'y a aucune précipitation. Mais je tiens à dire que nous avons toujours été contre l'immigration clandestine. Il faut que les compatriotes comprennent qu'ils doivent être en règle dans le pays d'accueil.

Ceux de vos compatriotes qui viennent en France font-ils le bon choix ?

Ils ne vont pas forcément trouver un eldorado. Mais ces gens qui viennent ici, avez-vous vu dans quelle souffrance ils vivent pour nourrir leur famille ? Ils font beaucoup pour le développement économique du pays : c'est remarquable !

Je dois préciser que leur départ n'est pas toujours lié à une raison économique, c'est très culturel aussi chez nous de partir : ça forge l'homme.

Vous ne souhaitez pas les retenir ?

Nous oeuvrons pour qu'ils ne soient plus tentés par le départ. Et, pour ceux qui sont loin du pays, il nous faut trouver des projets afin qu'ils reviennent investir et s'installer chez eux. Nous y parviendrons.

Le Monde du 22.05.08

dimanche, mai 25, 2008

En Italie, un climat de chasse à l'étranger

Le Monde du 17.05.08

L'Italie ne procédera pas à des « expulsions de masse » d'immigrés en situation irrégulière. Le ministre de l'intérieur, Roberto Maroni, s'est senti obligé de le préciser, jeudi 15 mai, après une journée où la question de l'immigration et des Roms, les Tziganes d'origine roumaine, a monopolisé les débats.

A la « une » des journaux, le matin, on pouvait voir les photos des incendies de camps de Roms à Ponticelli, près de Naples, à la suite d'une tentative de rapt d'un bébé italien de la part d'une Tzigane. Dans l'après-midi, le chef de la police criminelle Francesco Gratteri annonçait les résultats d'une vaste opération contre le crime lié à l'immigration clandestine : dans neuf régions du pays, 383 personnes dont 268 étrangers, essentiellement originaires de Roumanie et des pays du Maghreb, ont été interpellés pour trafic de drogue, exploitation de l'immigration clandestine, vols et proxénétisme. Une cinquantaine d'étrangers ont été expulsés. 65 autres ont été placés dans des centres de rétention.

Dans la soirée, la télévision diffusait les images de la descente nocturne de la police municipale de Rome dans le plus grand camp Rom de la ville. Un climat de chasse à l'étranger semble s'installer alors que le gouvernement prépare un tour de vis contre l'immigration. Le paquet de mesures sur la sécurité devrait être approuvé lors du premier conseil des ministres qui se tiendra la semaine prochaine à Naples. Selon la presse, il devrait prévoir le nouveau délit d'immigration clandestine, le test ADN pour les regroupements familiaux ainsi que la justification d'un revenu et d'un logement décent sous peine d'un rapatriement dans le pays d'origine. La loi, dit-on, viserait principalement les Roms. Lesquels sont 160 000 en Italie. Un « commissaire » aux Roms sera nommé à Milan, Naples et Rome. Une mesure annoncée après la rencontre entre le ministre Maroni et son homologue roumain Cristian David, dépêché à Rome après que Bucarest s'est émue de la dérive xénophobe en Italie. Tout semble réglé. Les rapports entre les deux pays sont « excellents », a déclaré M. David. La création d'une commission paritaire pour une coopération policière renforcée est envisagée. Mercredi, le premier ministre roumain assurait à ses compatriotes que le paquet législatif italien ne les ciblait pas.

Les Eglises chrétiennes de France pour une immigration qui respecte droits et valeurs

Le Conseil d'Eglises chrétiennes en France, qui regroupe catholiques, protestants et orthodoxes, a estimé le 14 mai que la présidence française de l'UE devait être « une chance pour que l'harmonisation des politiques migratoires se fasse dans le respect des valeurs et des droits qui ont fait de [l'Europe] un espace de liberté et de paix ». - (AFP.)

samedi, mai 24, 2008

La lutte contre les clandestins se généralise en Europe

L'union européenne, dans son ensemble, s'apprête à renforcer sa lutte contre l'immigration clandestine. Mercredi 21 mai, les ambassadeurs des vingt-sept Etats membres étaient réunis pour tenter de trouver un accord sur le projet de directive visant à harmoniser les normes d'expulsion des migrants illégaux.

Cette « directive retour » doit en principe être soumise le 4 juin au Parlement européen et le 5 juin au conseil des ministres, pour une adoption en première lecture. En l'état actuel, ce projet, qui fait encore l'objet d'intenses débats, autorise une durée de rétention jusqu'à 18 mois et instaure une interdiction de revenir en Europe pendant cinq ans.

Au cours de la présidence française de l'Union, au second semestre 2008, le président Nicolas Sarkozy entend aussi parvenir à la signature d'un « pacte européen sur l'immigration » qui engagerait notamment les Etats membres à « renoncer aux régularisations massives et collectives » et à renforcer le contrôle des frontières de l'UE. D'un pays à l'autre, les politiques migratoires restent cependant encore très variables, et évolutives, au regard de la culture et de la conjoncture.

La France a depuis 2003 érigé en priorité la lutte contre l'immigration clandestine. Depuis lors, le gouvernement se fixe chaque année un objectif chiffré d'expulsions. Passé d'un peu moins de 10 000 en 2002 à 25 000 en 2007, celui-ci est chaque année revu à la hausse, bien que se révélant de plus en plus difficile à atteindre. Aussi la France a-t-elle adopté, entre 2003 et 2007, trois nouvelles lois visant à renforcer les outils de lutte contre l'immigration clandestine (évaluée entre 200 000 et 400 000 personnes) et à substituer une « immigration choisie » (professionnelle qualifiée) à « l'immigration subie » (familiale et illégale). Opposée à toute régularisation massive, la France a régularisé en 2006, sous la pression de la société civile, 6 927 parents d'enfants scolarisés.

Au Royaume-Uni, le gouvernement travailliste, un temps accusé de laxisme, met désormais l'accent sur la répression. Les autorités disent « éloigner » un clandestin toutes les huit minutes (plus de 63 000 en 2007). Le ministre de l'immigration, Liam Byrne, a récemment lancé un plan visant à accélérer le rythme des reconduites à la frontière. Le programme prévoit l'accroissement de 60 % du nombre de places en centres de rétention ainsi que le renforcement des contrôles aux frontières nationales (le Royaume-Uni ne fait pas partie de l'espace Schengen). Londres compte mettre en place progressivement la carte d'identité, sujet très controversé dans le pays, et la prise d'empreintes digitales pour les demandeurs de visa. Un nouveau système d'« immigration à points », visant une immigration « choisie », est en cours d'application.

En Allemagne, l'immigration clandestine constitue un délit passible d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement jusqu'à un an. Pour lutter contre l'immigration illégale (évaluée entre 100 000 et un million de personnes), la police allemande a multiplié ces dernières années les contrôles à l'intérieur du pays. Toutefois, depuis 2007, une législation permet de régulariser certains immigrés en situation irrégulière. Il s'agit d'étrangers dits « tolérés » dont la procédure d'expulsion a été suspendue pour diverses raisons. 14 750 « tolérés » sur les 154 780 existants ont déjà été régularisés.

En Espagne, le temps des régularisations massives est révolu. La conjoncture économique a convaincu le gouvernement Zapatero d'adopter des mesures répressives à l'encontre de l'immigration clandestine (évaluée entre 300 000 et 800 000 personnes). Si les étrangers d'Europe, d'Amérique latine et du Maroc continuent d'être nombreux à venir chercher du travail, les autorités luttent surtout contre l'arrivée des sans-papiers d'Afrique subsaharienne. En 2007, les rapatriements se sont élevés à 55 938 - 6 % de plus qu'en 2006 et l'arrivée des sans-papiers par mer s'est réduite de 54 %.


Source : Le Monde du 23.05.08

jeudi, mai 15, 2008

Immigration choisie : quand la « rupture » se heurte aux réalités du marché du travail

Immigration choisie : quand la « rupture » se heurte aux réalités du marché du travail

Le Monde du 06.05.08

Prenant acte d'une nécessaire relance de l'immigration de travail (6 % des flux migratoires annuels seulement), la politique du nouveau Ministère de l'immigration marque, du moins dans ses postulats, un tournant par rapport à celles qui l'ont précédée ces trente dernières années. Des listes de métiers ouverts, région par région, aux étrangers ont ainsi été établies.

Ce tournant ira jusqu'à conduire le nouveau ministre de l'immigration à accueillir, bon gré mal gré, dans son projet de loi présenté à l'automne 2007, un amendement ouvrant la possibilité pour des étrangers en situation irrégulière d'obtenir un titre de séjour sur la base d'une promesse d'embauche.

Cependant, cette « rupture » est occultée par la priorité donnée à la lutte contre l'immigration irrégulière. Incarnée par la « culture du résultat », cette priorité soumet les préfectures à des objectifs chiffrés de reconduites « effectives » d'étrangers à la frontière. Des objectifs, d'une année sur l'autre, revus à la hausse : 25 000 reconduites prévues en 2007, 26 000 en 2008.

Le ministre de l'immigration n'a de cesse de souligner que sa politique « ne se résume pas à un chiffre ». Selon M. Hortefeux, « il y a le principe - tout immigré en situation irrégulière a vocation à être reconduit dans son pays d'origine - et la pratique », laquelle n'interdit pas d'examiner les situations particulières « avec justice et humanisme ».

ARRESTATION ILLÉGALE

Reste que les préfectures, soumises à forte pression, finissent par rester sourdes à des situations individuelles, que celles-ci se caractérisent par des problèmes sanitaires, familiaux, sociaux, ou même qu'elles remplissent les critères de l'immigration choisie, répondant à un réel besoin économique. Convocations-pièges en préfecture, « chasses » dans certains quartiers, arrestations à domicile : l'administration est entraînée dans une telle surenchère qu'elle en vient à développer des pratiques à la limite de la légalité.

Le 6 février 2007, la Cour de cassation a pourtant considéré comme illégale l'arrestation d'un sans-papiers convoqué au guichet d'une préfecture.

Les associations ne sont plus les seules à s'alarmer de cette spirale. Des policiers, des juges, des avocats sont aussi nombreux à dénoncer les dérives liées à la politique des expulsions.

Les récentes grèves, inédites, de travailleurs réclamant des titres de séjour témoignent des contradictions de la situation. Le gouvernement, soucieux de ne pas céder à la pression et de ne pas prêter le flanc aux critiques de l'extrême droite, insiste sur le caractère « exceptionnel » et discrétionnaire du dispositif de régularisation par le travail, et rappelle que sa priorité reste « la lutte contre l'emploi illégal des étrangers ». Le ministère de l'immigration évoque quelques centaines de salariés et défend un « examen au cas par cas ». Mais les étrangers concernés sont plus probablement plusieurs dizaines de milliers.

La méthode du « cas par cas » comporte en outre un risque : celui de bafouer le principe constitutionnel d'équité, en masquant la fixation de quotas arbitraires. Ce fut le cas à l'été 2006, lorsque, sur 33 500 demandeurs, seuls 6 900 parents sans papiers d'enfants scolarisés avaient été régularisés.

Dans le même temps, les réalités du marché du travail imposeront de conserver la main-d'oeuvre immigrée dans les emplois non délocalisables et peu convoités par les Français (BTP, restauration, services à la personne...). « Il est de bon sens, avant d'accueillir de nouveaux étrangers, de voir si certains, qui sont déjà sur notre sol, ne correspondent pas aux besoins affichés région par région », ont souligné, dans un récent communiqué, les députés UMP Frédéric Lefebvre et Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale.

mardi, mai 06, 2008

Immigrés, assimilation, intégration, insertion : quelques définitions

Immigrés, assimilation, intégration, insertion : quelques définitions

Dans son ouvrage « L’immigration » (collection Débat Public, 2006), Laetitia Van Eeckhout présente et explique le thème de l’immigration en 135 questions, en précisant les conditions historiques, les évolutions et les enjeux de ce phénomène.

Les deux questions reproduites ici définissent clairement les notions essentielles des débats sur l’immigration : immigré, assimilation, intégration, insertion.

Qu’est-ce qu’un immigré ?

« Est immigrée toute personne née de parents étrangers à l’étranger et qui réside sur le territoire français. Certains immigrés deviennent français par acquisition de la nationalité française, les autres restent étrangers : "Tout immigré n’est pas nécessairement étranger, et réciproquement", souligne l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). La qualité d’immigré est permanente : un individu continue à appartenir à la population immigrée même s’il devient français par acquisition. En revanche, on parle souvent d’immigrés de la deuxième ou troisième génération pour désigner les enfants dont les parents ou les grands-parents sont immigrés. Pour ceux, nombreux, qui sont nés en France, c’est un abus de langage. Les enfants d’immigrés peuvent cependant être étrangers, s’ils choisissent de garder la nationalité d’origine de leurs parents. »

Etrangers et immigrés en France

Les données issues des enquêtes de recensement de l’INSEE permettent de bien distinguer étrangers et immigrés en France.

Schéma représentant les étrangers et immigrés en France
Source : INSEE, enquêtes annuelles de recensement 2004 et 2005 (chiffres pour la métropole).

Assimilation, intégration ou insertion ?

« Ces trois termes ne sont pas neutres et reposent sur des philosophies politiques (très) différentes. L’assimilation se définit comme la pleine adhésion par les immigrés aux normes de la société d’accueil, l’expression de leur identité et leurs spécificités socioculturelles d’origine étant cantonnée à la seule sphère privée. Dans le processus d’assimilation, l’obtention de la nationalité, conçue comme un engagement "sans retour", revêt une importance capitale.

L’intégration exprime davantage une dynamique d’échange, dans laquelle chacun accepte de se constituer partie d’un tout où l’adhésion aux règles de fonctionnement et aux valeurs de la société d’accueil, et le respect de ce qui fait l’unité et l’intégrité de la communauté n’interdisent pas le maintien des différences.

Le processus d’insertion est le moins marqué. Tout en étant reconnu comme partie intégrante de la société d’accueil, l’étranger garde son identité d’origine, ses spécificités culturelles sont reconnues, celles-ci n’étant pas considérées comme un obstacle à son intégration dès lors qu’il respecte les règles et les valeurs de la société d’accueil. »