dimanche, octobre 28, 2007

Enseignement de l'immigration: l'Ecole peut mieux faire, selon un rapport

Enseignement de l'immigration: l'Ecole peut mieux faire, selon un rapport

Un élève écrit au tableau dans une salle de classeMychele Daniau(AFP)
En France, l'Ecole peine à concevoir et à enseigner l'histoire de l'immigration en tant qu'"histoire commune concernant l'ensemble de la nation", selon un rapport du professeur d'histoire et chercheur à l'INRP Benoît Falaize.


Ces travaux, commandés par la Cité nationale de l'histoire de l'immigration à Paris, et réalisés pour l'Institut national de recherche pédagogique, ont été présentés à un auditoire - conquis - d'instituteurs qui participent à l'Université d'automne du SNUipp-FSU (principal syndicat du primaire) à La-Londe-Les-Maures (Var) jusqu'à dimanche.

Pas moins de 247 manuels ont été passés au crible et une cinquantaine d'enseignants dans toute la France interrogés.

Premier constat, selon le chercheur: il faut "attendre ces cinq dernières années" pour que l'histoire de l'immigration occupe "une place de moins en moins anecdotique" dans le cursus scolaire. Dans les années 80 et 90, "à aucun moment, dans aucun document officiel, l'immigration n'est envisagée comme un thème d'étude en lui-même".

Depuis 2000, "une évolution est perceptible", mais le sujet "reste à la marge", selon lui. L'histoire de l'immigration "occupe une faible place dans les programmes scolaires" et "dans les manuels", même si cette place se fait plus importante au lycée, estime-t-il.







En outre, dans les livres, la question est abordée "très souvent sous l'angle de l'intégration et de l'exclusion et moins sous celui de l'histoire stricto sensu", constate M. Falaize.

Il cite le cas d'un manuel qui traite le sujet avec... une photo de l'équipe de France de la Coupe du Monde de football de 1998.

De même, en classe, "l'histoire de l'immigration est peu enseignée du point de vue historique". Ce sont les matières comme la géographie, l'éducation civique ou les langues et les lettres qui prennent en charge cet enseignement, mais là encore, "moins dans ses dimensions historiques que contemporaines".

Le chercheur l'explique notamment par le fait que "l'actualité (politique, proche orientale, économique et sociale)" vient "exercer une pression accablante" au sein d'un monde éducatif "particulièrement réceptif aux notions de respect, de tolérance et d'ouverture au monde".

Mais en résulte un "enseignement diffus et peu structuré", selon lui. "C'est comme si le présent obérait toute réflexion pédagogique", explique-t-il à son auditoire.

M. Falaize relève aussi que l'approche des enseignants qui consiste à prendre appui sur les familles des élèves présents en classe pour aborder le sujet, en valorisant la différence et la richesse "supposées octroyées par l'origine", est parfois en "déphasage" avec la réalité.

"Les enfants sont renvoyés à une identité qui n'est plus la leur !(...) Combien de générations faudra-t-il en France pour arrêter de considérer que +Rachid+ est un immigré?", a-t-il lancé.

"Il y a un +impensé+ de l'histoire migratoire en France, véhiculé par l'Ecole toute entière", qui ne concerne pas tant les immigrés que la France elle-même, qui ne voit pas qu'elle a une part étrangère qui l'a toujours composée", affirme-t-il.

L'histoire de l'immigration n'est pas envisagée sous l'angle d'une "histoire commune, partagée, concernant l'ensemble de la nation", résume-t-il.

Quel remède ? "Changer de posture intellectuelle", rester neutre et enseigner "l'histoire de l'immigration dans sa continuité et dans sa complexité".

Pas suffisamment de Carte 'compétences et talents"

Immigration: la Carte compétences et talents fait pschit
Par Lise Barcellini (Journaliste), Rue89.com, 28/10/2007

L’annonce avait fait grand bruit. Le gouvernement et son ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, voulaient favoriser "l’immigration de travail choisie, face à l’immigration familiale subie". Tête de gondole de cette politique: la Carte compétences et talents, délivrée pour trois ans renouvelables une fois à l’étranger "résidant ou non en France, susceptible de participer en raison de ses compétences et de ses talents, de façon significative et durable, au développement économique ou au rayonnement, notamment intellectuel, scientifique, culturel, humanitaire ou sportif de la France et du pays dont il a la nationalité".

Dénoncée par l’opposition comme l’outil d’un "pillage des cerveaux", et d’un "tri des immigrés", la mesure avait été largement médiatisée. Plus d’un an après sa création par la loi du 24 juillet 2006 et sept mois après la parution du décret d’application du 22 mars 2007, aucune carte de séjour portant mention "compétences et talents" n’a encore été délivrée.

"La mise en application a simplement été repoussée"

Au ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Codéveloppement, l'attachée de presse Nadia Angers-Diebold est chargée de porter la parole officielle:

"Je ne parlerai pas de retard, le terme ne me semble pas exact. La mise en application a tout simplement été repoussée dans le temps. Il a fallu adapter le décret d’application à la création d’un nouveau ministère. Monsieur Hortefeux a aussi souhaité se rendre dans plusieurs pays pour signer des accords concertés de flux migratoires. Tout cela prend du temps."


"Moins d’un an et demi pour mettre en place une mesure de ce type, c’est plutôt très bien", assure Elsa Hervy, membre du cabinet de Brice Hortefeux. Même son de cloche chez le député Thierry Mariani (UMP, Vaucluse), rapporteur de la loi sur l’immigration 2006. Pour lui, le délai est, certes, regrettable mais s’explique aisément:


Officiellement, la commission chargée de définir les critères de délivrance de la carte n'a pas été mise en place. Définie par le décret du 22 mars 2007, la "Commission nationale des compétences et des talents" doit, à terme, réunir, outre son président, un député, un sénateur, un membre du Conseil économique et social (CES), le président de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII), et des représentants issus de chaque ministère concerné (Intérieur, Affaires étrangères, Emploi, Economie, Education, Culture, Sports). Avec la création d’un nouveau ministère de tutelle, celui de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement, un nouveau décret modifiant la composition de la commission doit être publié.

Depuis le 29 août 2007, la commission a enfin un président: Pierre Bellon, 77 ans, fondateur et ancien PDG de Sodexho. Mais pourquoi les 14 autres membres tardent-ils à être nommés? "Aucune idée", reconnaît Thierry Mariani.

"Un bel exemple de frénésie législative"

Pour la gauche et les associations d’aide aux étrangers, ce délai de mise en œuvre n’a rien d’étonnant. Pour Serge Blisko (PS, Paris), chargé des questions d’immigration pour le groupe socialiste à l'Assemblée:

"C’est un bel exemple de la frénésie législative, il serait même possible de dire de l'obsession compulsive, du gouvernement."


Pour le député Noël Mamère (Verts, Gironde), c’est de l’"enfumage":


Présidente du Gisti, le Groupe d’information et de soutien des immigrés, Nathalie Ferré y voit un "gadget", outil d’une stratégie de communication bien huilée:







Selon elle, Brice Hortefeux aurait eu du mal à trouver un président pour sa commission:

"En juillet, quand je l’ai rencontré, c’était l’une de ses principales préoccupations. En rigolant, il m’avait d’ailleurs demandé si je ne voulais pas prendre la présidence."


"Avant la fin de l’année"

En fait, la commission est déjà installée. Sans être secret, son démarrage n’a pas été officiel. Même le député Mariani ne semble pas avoir été mis dans la confidence. Mais l’agenda du ministre Hortefeux est formel: à 9h15 lundi 22 octobre, on peut y lire "Installation de la Commission compétences et talents, sous la présidence de M. Pierre BELLON."

Selon nos informations, Brice Hortefeux aurait, ce jour-là, "recadré" les pistes de travail sur lesquelles certains futurs membres et collaborateurs sont déjà en train de plancher. L’installation officielle ne devrait pourtant avoir lieu que début décembre. D’ici là, Pierre Bellon ne souhaite pas s’exprimer sur la question. Et au ministère, personne ne sait rien:

"Nous n’avons pas de délai à communiquer, seulement que le ministre souhaite délivrer les premières cartes avant la fin de l’année."


150 facilitations avec le Congo

Au final, combien d’étrangers pourront bénéficier de la Carte compétences et talents? Le ministère confirme son objectif: faire passer l’immigration professionnelle de 7 à 50% de l’immigration totale. Sans toutefois donner de délai pour l’atteindre.

En déplacement au Congo, Brice Hortefeux vient de conclure un "accord concerté des flux migratoires" qui pose comme principe un seuil maximum de 150 facilitations de demande de Carte compétences et talents chaque année. Un accord de ce type a déjà été signé avec le Gabon et le Sénégal. Celui avec le Bénin est encore en discussion.

Nathalie Ferré rappelle que la Carte compétences et talents n'est qu'un titre parmi d'autres dans l'arsenal juridique pour les étrangers travaillant en France:

"L’objectif de 50% ne passera pas par les délivrances de Cartes compétences et talents. Seule une poignée d’étrangers devraient être concernés. Et pas les sans-papiers qui sont déjà sur notre territoire."


Au Gisti, de mémoire de permanents, seules deux demandes de renseignement ont porté sur la Carte compétences et talents depuis son lancement, il y a plus d’un an… Aucun des requérants ne pouvait y prétendre.

Loi sur l’immigration : maîtrise et intégration

Adopté définitivement par le Parlement le 23 octobre, le projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile a pour objectif de mettre en œuvre le principe d’une « immigration choisie » et d’assurer un meilleur encadrement des conditions de regroupement familial.

Présenté par Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement, le projet de loi adopté par le Parlement le 23 octobre s’inscrit dans la continuation des réformes engagées par les lois du 26 novembre 2003 et du 24 juillet 2006 relatives à l’immigration. Il vient les compléter en permettant un meilleur encadrement du regroupement familial et en rééquilibrant les flux migratoires en faveur de l’immigration économique.

L’immigration française est, en effet, aujourd’hui très majoritairement « familiale » et très minoritairement « économique » : en 2005, par exemple, 185 000 titres de séjour avaient été délivrés, dont 94 500 au titre du regroupement familial, 49 000 aux étudiants et 13 000, soit 7% seulement, au titre de l’immigration économique. Un mouvement volontariste de rééquilibrage a donc été engagé.

Ce texte a pour objectif de metttre en oeuvre le principe d'une immigration choisie et d'assurer un meilleur encadrement des conditions du regroupement familial.

Voici les principales mesures du texte :

- Organisation dans le pays de résidence une formation de connaissance de la langue française et des valeurs de la République pour les candidats au regroupement familial. Afin de préparer l’intégration à la société française en amont, dès le pays d’origine, toute personne souhaitant rejoindre la France dans le cadre du regroupement familial fera l’objet d’une évaluation d’une quinzaine de minutes permettant d’apprécier le degré de connaissances de la langue française et des valeurs de la République. Ce test devrait concerner entre 30 000 et 40 000 personnes. Si le besoin s’en fait sentir, l’autorité administrative organisera une formation d’une durée maximale de deux mois (soit 80 à 180 heures de cours) dans le pays de résidence. Cette évaluation ne concerne pas les personnes âgées de plus de 65 ans et peut se poursuivre en France pour les conjoints de français.

- Mise en place d'un contrat d’accueil et d’intégration pour les parents ayant bénéficié d’un regroupement familial : celui-ci sera signé entre l’Etat français et les parents qui s’engageront à respecter les valeurs de la République, fondées sur la laïcité, la monogamie et l’égalité entre hommes et femmes. Dans ce cadre, les parents recevront une formation sur leurs droits et devoirs en France. En cas de non respect du contrat, des mesures d’accompagnement seront prises, pouvant aller jusqu’à une décision du juge pour enfant de confier les allocations familiales à un tiers.

- Augmentation du plafond du montant minimal de ressources pour toute personne demandant le regroupement familial : celui qui souhaite faire venir son conjoint et ses enfants en France devra prouver qu’il dispose d’un revenu permettant de faire vivre sa famille dans des conditions décentes. Le projet de loi prévoit ainsi un revenu pouvant varier entre le montant du SMIC et 1,2 fois le SMIC selon la taille de la famille. Il s’agit de s’assurer que les familles étrangères arrivant en France pourront faire face aux dépenses nécessaires à leur installation et commencer dans de bonnes conditions leur intégration.

- Mise en place d'une procédure de test ADN : l’amendement controversé, déposé par Thierry Mariani, député du Vaucluse, a subi un certain nombre de modifications au cours des lectures successives au Parlement. En définitive, cet amendement est maintenu dans sa version corrigée par le sénat : les tests seront donc facultatifs -les personnes devront être volontaires pour le faire- et à la charge de l’Etat français. Cette mesure est à titre expérimental.Le tribunal de grande instance de Nantes devra statuer sur la nécessité d'une telle vérification. Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis du Conseil consultatif national d'éthique, définira les conditions de mise en œuvre, la liste des pays concernés, la durée de l'expérimentation de la mesure.

- Création d'un livret épargne-codéveloppement : ce livret permet aux étrangers présents en France d’ouvrir un "compte épargne codéveloppement" afin d’investir dans leur pays d’origine tout en bénéficiant d’exonérations fiscales dès lors que leur pays est mentionné dans l’arrêté du 23 mars 2007. Le versement initial sur le compte doit au moins être égal à 50 euros et le montant maximum des sommes placées ne doit pas dépasser 50 000 euros.

- Promotion de l’intégration par le travail : celle-ci passe par deux dispositions : la généralisation du bilan de compétences pour les étrangers en situation irrégulière qui arrivent en France, et la possibilité donnée aux préfets, dans des cas exceptionnels, de délivrer des autorisations de séjour aux étrangers témoignant de leur capacité d’intégration par le travail et exerçant leur métier dans des secteurs en manque de main d’œuvre.

- Création d'une carte de résident permanent : d’une durée illimitée, celle-ci facilitera la vie des étrangers parfaitement intégrés et qui résident depuis très longtemps en France en leur évitant le renouvellement tous les 10 ans de la carte et les lourdeurs administratives qui y sont liées.

- Instauration d'un droit au recours suspensif au profit des demandeurs d’asile dont la demande est refusée à l’entrée sur le territoire. Concrètement, les étrangers qui demandent l’asile à Roissy, à leur descente d’avion, pourront, lorsqu’ils estiment que la France leur refuse à tort le statut de réfugié, rester dans la zone d’attente jusqu’à ce que la décision soit prise par le juge en urgence.

- Mise en place de statistiques de la diversité : celles-ci permettront de lutter contre les discriminations qui sont aujourd’hui très difficiles à évaluer. Ces statistiques seront naturellement encadrées strictement par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) qui autorisera le traitement des données et veillera à la qualité scientifiques des études envisagées. Les personnes concernées par l'étude devront en être informées et auront le droit de refuser de faire partie de l'échantillon.

- Tutelle de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) confiée au ministère de l’Immigration, de l’Intégration et de l’Identité nationale : Celle-ci était jusqu’ici confiée au ministère des Affaires étrangères. Il s’agit de tenir compte de la nouvelle organisation gouvernementale et de privilégier d’efficacité.


En savoir plus :
Le projet de loi sur le site de l'Assemblée nationale
Le projet de loi sur le site du Sénat

samedi, octobre 27, 2007

Loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, adoptée le 23 octobre 2007

Attention, Loi non encore promulguée et soumise au contrôle du Conseil constitutionnel.


CHAPITRE 1er Dispositions relatives à l'immigration pour des motifs de vie privée et familiale et à l'intégration

(CMP) Article 1er

Après l'article L.411-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 411-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 411-8. – Pour lui permettre de préparer son intégration républicaine dans la société française, le ressortissant étranger âgé de plus de seize ans et de moins de soixante-cinq ans pour lequel le regroupement familial est sollicité bénéficie, dans son pays de résidence, d'une évaluation de son degré de connaissance de la langue et des valeurs de la République. Si cette évaluation en établit le besoin, l'autorité administrative organise à l'intention de l'étranger, dans son pays de résidence, une formation dont la durée ne peut excéder deux mois, au terme de laquelle il fait l'objet d'une nouvelle évaluation de sa connaissance de la langue et des valeurs de la République. La délivrance du visa est subordonnée à la production d'une attestation de suivi de cette formation. Cette attestation est délivrée immédiatement à l'issue de la formation. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application de ces dispositions, notamment le délai maximum dans lequel l'évaluation et la formation doivent être proposées à compter du dépôt du dossier complet de la demande de regroupement familial, le contenu de l'évaluation et de la formation, le nombre d'heures minimum que la formation doit compter ainsi que les motifs légitimes pour lesquels l'étranger peut en être dispensé. »

(CMP) Article 2
L’article L. 411‑5 du même code est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du 1° est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :
« Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la personne qui demande le regroupement familial est titulaire de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ou de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code. » ;
2° À la fin du 3°, les mots : « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » sont remplacés par les mots : « principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil ».

(CMP) Article 3
La dernière phrase du premier alinéa du III de l'article L. 313-11-1 du même code est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Un décret en Conseil d'État fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. »

(AN1) Article 4
Le dernier alinéa de l’article L. 431‑2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de violence commise après l’arrivée en France du conjoint mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale”. »

(CMP) Article 5
Dans le dernier alinéa de l'article L. 431-2 du même code, les mots : « à l'initiative de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial, » sont supprimés, et les mots : « de son titre de séjour » sont remplacés par les mots : « du titre de séjour de l'étranger admis au séjour au titre du regroupement familial ».

(CMP) Article 6
Après l'article L. 311-9 du même code, il est inséré un article L. 311-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-9-1. – L'étranger admis au séjour en France et, le cas échéant, son conjoint préparent, lorsqu'un ou plusieurs enfants ont bénéficié de la procédure de regroupement familial, l'intégration républicaine de la famille dans la société française. À cette fin, ils concluent conjointement avec l'État un contrat d'accueil et d'intégration pour la famille par lequel ils s'obligent à suivre une formation sur les droits et les devoirs des parents en France, ainsi qu'à respecter l'obligation scolaire. Le président du conseil général est informé de la conclusion de ce contrat.
« En cas de non-respect des stipulations de ce contrat, manifesté par une volonté caractérisée de l'étranger ou de son conjoint, le préfet peut saisir le président du conseil général en vue de la mise en œuvre du contrat de responsabilité parentale prévue à l'article L. 222-4-1 du code de l'action sociale et des familles.
« Lors du renouvellement de leur carte de séjour, l'autorité administrative tient compte du non-respect manifesté par une volonté caractérisée, par l'étranger et son conjoint, des stipulations du contrat d'accueil et d'intégration pour la famille et, le cas échéant, des mesures prises en application du deuxième alinéa.
« Les conditions d'application de ces dispositions sont fixées par décret en Conseil d'État. »

(CMP) Article 7
L'article L. 311-9 du même code est ainsi modifié :
1° Dans la quatrième phrase du deuxième alinéa, les mots : « , le cas échéant, » sont supprimés ;
2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il fixe les situations dans lesquelles le bilan de compétences n'est pas proposé. »

(AN1) Article 8
Dans le troisième alinéa de l’article L. 311‑9 du même code, les mots : « il peut être tenu » sont remplacés par les mots : « l’autorité administrative tient ».

(CMP) Article 9
Le quatrième alinéa de l'article L. 311-9 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en est de même de l'étranger titulaire de la carte de séjour mentionnée au 5° de l'article L. 313-10 ou à l'article L. 315-1, de son conjoint et de ses enfants âgés de plus de seize ans. »

(CMP) Article 10
L'article L. 211-2-1 du même code est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve des conventions internationales, pour lui permettre de préparer son intégration républicaine dans la société française, le conjoint de Français âgé de moins de soixante-cinq ans bénéficie, dans le pays où il sollicite le visa, d'une évaluation de son degré de connaissance de la langue et des valeurs de la République. Si cette évaluation en établit le besoin, les autorités mentionnées au premier alinéa organisent à l'intention de l'intéressé, dans le pays où il sollicite le visa, une formation dont la durée ne peut excéder deux mois, au terme de laquelle il fait l'objet d'une nouvelle évaluation de sa connaissance de la langue et des valeurs de la République. La délivrance du visa est subordonnée à la production d'une attestation de suivi de cette formation. Cette attestation est délivrée immédiatement à l'issue de la formation. Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application de ces dispositions, notamment le délai maximum dans lequel l'évaluation et la formation doivent être proposées, le contenu de l'évaluation et de la formation, le nombre d'heures minimum que la formation doit compter ainsi que les motifs légitimes pour lesquels l'étranger peut en être dispensé.
« Lorsque la demande de visa émane d'un étranger dont le conjoint de nationalité française établi hors de France souhaite établir sa résidence habituelle en France pour des raisons professionnelles, les dispositions du deuxième alinéa ne sont pas applicables, sauf si le mariage a été célébré à l'étranger par une autorité étrangère et n'a pas fait l'objet d'une transcription. » ;
2° Le début du deuxième alinéa est ainsi rédigé : « Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé ... (le reste sans changement) » ;
3° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour.
« Dans des conditions définies par décret en Conseil d'État, par dérogation à l'article L. 311-1, le visa délivré pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois au conjoint d'un ressortissant français donne à son titulaire les droits attachés à la carte de séjour temporaire prévue au 4° de l'article L. 313-11 pour une durée d'un an. »

(CMP) Article 11
Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 311-9 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« L'étranger pour lequel l'évaluation du niveau de connaissance de la langue prévue à l'article L. 411-8 et au deuxième alinéa de l'article L. 211-2-1 n'a pas établi le besoin d'une formation est réputé ne pas avoir besoin d'une formation linguistique. »

(AN1) Article 12
Le 7° de l’article L. 313-11 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L’insertion de l’étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. »

(CMP) Article 13.
- I. – L'article L. 111-6 du même code est complété par neuf alinéas ainsi rédigés :
« Le demandeur d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois, ou son représentant légal, ressortissant d'un pays dans lequel l'état civil présente des carences, qui souhaite rejoindre ou accompagner l'un de ses parents mentionné aux articles L. 411-1 et L. 411-2 ou ayant obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, peut, en cas d'inexistence de l'acte de l'état civil ou lorsqu'il a été informé par les agents diplomatiques ou consulaires de l'existence d'un doute sérieux sur l'authenticité de celui-ci qui n'a pu être levé par la possession d'état telle que définie à l'article 311-1 du code civil, demander que l'identification du demandeur de visa par ses empreintes génétiques soit recherchée afin d'apporter un élément de preuve d'une filiation déclarée avec la mère du demandeur de visa. Le consentement des personnes dont l'identification est ainsi recherchée doit être préalablement et expressément recueilli. Une information appropriée quant à la portée et aux conséquences d'une telle mesure leur est délivrée.
« Les agents diplomatiques ou consulaires saisissent sans délai le tribunal de grande instance de Nantes pour qu'il statue, après toutes investigations utiles et un débat contradictoire, sur la nécessité de faire procéder à une telle identification.
« Si le tribunal estime la mesure d'identification nécessaire, il désigne une personne chargée de la mettre en oeuvre parmi les personnes habilitées dans les conditions prévues au dernier alinéa.
« La décision du tribunal et, le cas échéant, les conclusions des analyses d'identification autorisées par celui-ci, sont communiquées aux agents diplomatiques ou consulaires. Ces analyses sont réalisées aux frais de l'État.
« Un décret en Conseil d'État, pris après avis du Comité consultatif national d'éthique, définit :
« 1° Les conditions de mise en œuvre des mesures d'identification des personnes par leurs empreintes génétiques préalablement à une demande de visa ;
« 2° La liste des pays dans lesquels ces mesures sont mises en œuvre, à titre expérimental ;
« 3° La durée de cette expérimentation, qui ne peut excéder dix-huit mois à compter de la publication de ce décret et qui s'achève au plus tard le 31 décembre 2009 ;
« 4° Les modalités d'habilitation des personnes autorisées à procéder à ces mesures. »
II. – Dans le premier alinéa de l'article 226-28 du code pénal, après les mots : « procédure judiciaire », sont insérés les mots : « ou de vérification d'un acte de l'état civil entreprise par les autorités diplomatiques ou consulaires dans le cadre des dispositions de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ».
III. – Une commission évalue annuellement les conditions de mise en œuvre du présent article. Elle entend le président du tribunal de grande instance de Nantes. Son rapport est remis au Premier ministre. Il est rendu public. La commission comprend :
1° Deux députés ;
2° Deux sénateurs ;
3° Le vice-président du Conseil d'État ;
4° Le premier président de la Cour de cassation ;
5° Le président du Comité consultatif national d'éthique ;
6° Deux personnalités qualifiées, désignées par le Premier ministre.
Son président est désigné parmi ses membres par le Premier ministre.

(CMP) Article 14
La seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 313‑12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi rédigée :
« Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement. »

(AN1) Article 15
Le deuxième alinéa de l’article L. 313‑12 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« En cas de violence commise après l’arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention “vie privée et familiale”. »

(CMP) Article 16
Dans la seconde phrase de l'article L. 314-5-1 du même code, les mots : « à l'initiative de l'étranger » sont supprimés.

(CMP) Article 17
La section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre III du même code est complétée par une sous-section 4 ainsi rédigée :
« Sous-section 4 La carte de résident permanent
« Art. L. 314-14. – À l'expiration de sa carte de résident délivrée sur le fondement de l'article L. 314-8, L. 314-9, L. 314‑11 ou L. 314-12, une carte de résident permanent, à durée indéterminée, peut être délivrée à l'étranger qui en fait la demande, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public et à condition qu'il satisfasse aux conditions prévues à l'article L. 314-2.
« Lors du dépôt de sa demande de renouvellement de carte de résident, l'étranger est dûment informé des conditions dans lesquelles il pourra se voir accorder une carte de résident permanent.
« Les articles L. 314-4 à L. 314-7 sont applicables à la carte de résident permanent.
« Lorsque la carte de résident permanent est retirée à un ressortissant étranger qui ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3, une carte de séjour temporaire lui est délivrée de plein droit. »

(CMP) Article 18
La seconde phrase de l'article L. 314-4 du même code est supprimée.

(CMP) Article 19
Dans la première phrase du premier alinéa de l'article L. 314-8 du même code, les références : « et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et à l'article L. 315-1 » sont remplacées par les références : « , L. 313‑14 et L. 314-9, aux 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 9° de l'article L. 314-11 et aux articles L. 314-12 et L. 315-1 ».

(CMP) Article 20
Le second alinéa de l'article L. 121-3 du même code est ainsi rédigé :
« S'il est âgé de plus de dix-huit ans ou d'au moins seize ans lorsqu'il veut exercer une activité professionnelle, il doit être muni d'une carte de séjour. Cette carte, dont la durée de validité correspond à la durée de séjour envisagée du citoyen de l'Union dans la limite de cinq années, porte la mention “carte de séjour de membre de la famille d'un citoyen de l'Union”. Sauf application des mesures transitoires prévues par le traité d'adhésion à l'Union européenne de l'État dont il est ressortissant, cette carte donne à son titulaire le droit d'exercer une activité professionnelle. »

(CMP) Article 21
L'article L. 312-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 312-1. – Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour composée :
« a) D'un maire ou de son suppléant désignés par le président de l'association des maires du département ou, lorsqu'il y a plusieurs associations de maires dans le département, par le préfet en concertation avec celles-ci et, à Paris, du maire, d'un maire d'arrondissement ou d'un conseiller d'arrondissement ou de leur suppléant désigné par le Conseil de Paris ;
« b) De deux personnalités qualifiées désignées par le préfet ou, à Paris, le préfet de police.
« Le président de la commission du titre de séjour est désigné, parmi ses membres, par le préfet ou, à Paris, le préfet de police.
« Dans les départements de plus de 500 000 habitants, une commission peut être instituée dans un ou plusieurs arrondissements. »

(CMP) Article 22
Dans le premier alinéa de l'article 225-4-1 du code pénal, après les mots : « pour la mettre », sont insérés les mots : « à sa disposition ou ».


CHAPITRE II Dispositions relatives à l'asile

(CMP) Article 23
Après la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 213-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« En cas de demande d'asile, la décision mentionne également son droit d'introduire un recours en annulation sur le fondement de l'article L. 213-9 et précise les voies et délais de ce recours. »

(CMP) Article 24
Le chapitre III du titre Ier du livre II du même code est complété par un article L. 213-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 213-9. – L'étranger qui a fait l'objet d'un refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile peut, dans les quarante-huit heures suivant la notification de cette décision, en demander l'annulation, par requête motivée, au président du tribunal administratif.
« Le président, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l'article L. 222-2-1 du code de justice administrative, statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.
« Aucun autre recours ne peut être introduit contre la décision de refus d'entrée au titre de l'asile.
« L'étranger peut demander au président du tribunal ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office. L'audience se déroule sans conclusions du commissaire du Gouvernement.
« Par dérogation au précédent alinéa, le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin peut, par ordonnance motivée, donner acte des désistements, constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur un recours et rejeter les recours ne relevant manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ou manifestement mal fondés.
« L'audience se tient dans les locaux du tribunal administratif compétent. Toutefois, sauf si l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend s'y oppose, celle-ci peut se tenir dans la salle d'audience de la zone d'attente et le président du tribunal ou le magistrat désigné à cette fin siéger au tribunal dont il est membre, relié à la salle d'audience, en direct, par un moyen de communication audiovisuelle qui garantit la confidentialité de la transmission. La salle d'audience de la zone d'attente et celle du tribunal administratif sont ouvertes au public. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification ou, en cas de saisine du président du tribunal administratif, avant que ce dernier ou le magistrat désigné à cette fin n'ait statué.
« Les dispositions du titre II du présent livre sont applicables.
« Le jugement du président du tribunal administratif ou du magistrat désigné par lui est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours devant le président de la cour administrative d'appel territorialement compétente ou un magistrat désigné par ce dernier. Cet appel n'est pas suspensif.
« Si le refus d'entrée au titre de l'asile est annulé, il est immédiatement mis fin au maintien en zone d'attente de l'étranger, qui est autorisé à entrer en France muni d'un visa de régularisation de huit jours. Dans ce délai, l'autorité administrative compétente lui délivre, à sa demande, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de déposer sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.
« La décision de refus d'entrée au titre de l'asile qui n'a pas été contestée dans le délai prévu au premier alinéa ou qui n'a pas fait l'objet d'une annulation dans les conditions prévues au présent article peut être exécutée d'office par l'administration. »

(CMP) Article 25
L'article L. 221-3 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « quatre jours » ;
2° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) La troisième phrase est supprimée ;
b) Dans la dernière phrase, les mots : « ou de son renouvellement » sont supprimés.

(CMP) Article 26
L'article L. 222-2 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, après les mots : « À titre exceptionnel », sont insérés les mots : « ou en cas de volonté délibérée de l'étranger de faire échec à son départ » ;
2° Dans la première phrase du second alinéa, les mots : « non admis à pénétrer sur le territoire français » sont remplacés par les mots : « dont l'entrée sur le territoire français a été refusée », et le mot : « quatre » est remplacé, par deux fois, par le mot : « six » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'un étranger dont l'entrée sur le territoire français au titre de l'asile a été refusée dépose un recours en annulation sur le fondement de l'article L. 213-9 dans les quatre derniers jours de la période de maintien en zone d'attente fixée par la dernière décision de maintien, celle-ci est prorogée d'office de quatre jours à compter du dépôt du recours. Cette décision est mentionnée sur le registre prévu à l'article L. 221-3 et portée à la connaissance du procureur de la République dans les conditions prévues au même article. Le juge des libertés et de la détention est informé immédiatement de cette prorogation. Il peut y mettre un terme. »

(CMP) Article 27
Après le chapitre VI du titre VII du livre VII du code de justice administrative, est inséré un chapitre VII ainsi rédigé :
« CHAPITRE VII Le contentieux des refus d'entrée sur le territoire
français au titre de l'asile
« Art. L. 777-1. – Les modalités selon lesquelles le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il a désigné examine les recours en annulation formés contre les décisions de refus d'entrée sur le territoire français au titre de l'asile obéissent aux règles fixées par l'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »

(AN1) Article 28
Le titre II du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Dans l’article L. 721‑1, les mots : « des affaires étrangères » sont remplacés par les mots : « chargé de l’asile » ;
2° L’article L. 722‑1 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, après le mot : « Sénat, », sont insérés les mots : « un représentant de la France au Parlement européen désigné par décret, » ;
b) À la fin du troisième alinéa, les mots : « des affaires étrangères » sont remplacés par les mots : « chargé de l’asile » ;
3° Dans l’article L. 722‑2, les mots : « nommé sur proposition conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre de l’intérieur » sont remplacés par les mots : « sur proposition conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l’asile » ;
4° À la fin de la première phrase du second alinéa de l’article L. 722-4, les mots : « du ministère des affaires étrangères » sont remplacés par les mots : « des services du ministre chargé de l’asile ».

(AN1) Article 29
I. – A. – Dans l’intitulé du titre III du livre VII du même code, les mots : « Commission des recours des réfugiés » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile ».
B. – Il est procédé au même remplacement :
1° Dans le 1° de l’article L. 513‑2 du même code ;
2° Dans l’article L. 731‑1 du même code ;
3° Dans la première phrase de l’article L. 731‑2 du même code ;
4° Dans la première phrase de l’article L. 731‑3 du même code ;
5° Dans l’article L. 742‑4 du même code ;
6° Dans le 5° de l’article L. 751‑2 du même code ;
7° Dans le deuxième alinéa du I de l’article L. 348‑2 du code de l’action sociale et des familles ;
8° Dans le quatrième alinéa de l’article 16 et la première phrase du premier alinéa de l’article 23 de la loi n° 91‑647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.
II. – Dans le premier alinéa de l’article L. 732‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le mot : « commission » est remplacé par le mot : « Cour nationale du droit d’asile ».
III. – A. – Dans l’article L. 733‑1 du même code, les mots : « commission des recours » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile ».
B. – Il est procédé au même remplacement :
1° Dans la première phrase de l’article L. 742‑3 du même code ;
2° Dans les 6° et 10° de l’article L. 751‑2 du même code.
IV. – Dans la dernière phrase de l’article L. 742‑1 du même code, les mots : « commission des recours, jusqu’à ce que la commission » sont remplacés par les mots : « Cour nationale du droit d’asile, jusqu’à ce que la cour ».

(CMP) Article 30
Après l'article L. 711-1 du même code, il est inséré un article L. 711-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 711-2. – L'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du présent livre VII et a signé le contrat d'accueil et d'intégration prévu par l'article L. 311-9 bénéficie d'un accompagnement personnalisé pour l'accès à l'emploi et au logement.
« À cet effet, l'autorité administrative conclut avec les collectivités territoriales et les autres personnes morales concernées ou souhaitant participer à cet accompagnement une convention prévoyant les modalités d'organisation de celui-ci. »

(CMP) Article 31
Après l'article L. 723-3 du même code, il est inséré un article L. 723-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 723-3-1. – L'office notifie par écrit sa décision au demandeur d'asile. Toute décision de rejet est motivée en fait et en droit et précise les voies et délais de recours.
« Aucune décision ne peut naître du silence gardé par l'office. »

(AN1) Article 32
La seconde phrase de l’article L. 742-3 du même code est ainsi rédigée :
« Le I de l’article L. 511-1 est alors applicable. »

(AN1) Article 33
Le premier alinéa de l’article L. 121‑2 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les ressortissants qui n’ont pas respecté cette obligation d’enregistrement sont réputés résider en France depuis moins de trois mois. »


CHAPITRE III Dispositions relatives à l'immigration pour motifs professionnels et dispositions diverses

(AN1) Article 34
L’article L. 111-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « et d’intégration » ;
2° Le i est remplacé par un i et un j ainsi rédigés :
« i) Le nombre de contrats souscrits en application des articles L. 311-9 et L. 311-9-1 ainsi que les actions entreprises au niveau national pour favoriser l’intégration des étrangers en situation régulière en facilitant notamment leur accès à l’emploi, au logement et à la culture ;
« j) Le nombre des acquisitions de la nationalité française. »

(CMP) Article 35
L'article L. 313-8 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'étranger mentionné au deuxième alinéa poursuit les mêmes travaux au-delà de trois mois, la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigée. »

(CMP) Article 36
Le 5° de l’article L. 313‑10 du même code est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, après les mots : « à la condition que », sont insérés les mots : « l'étranger justifie d'un contrat de travail datant d'au moins trois mois, que » ;
2° Les premier et quatrième alinéas sont complétés par les mots : « et sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 ».

(CMP) Article 37
Le code civil est ainsi modifié :
1° Les articles 185 et 186 sont abrogés ;
2° Dans l'article 190, les mots : « et sous les modifications portées en l'article 185 » sont supprimés.

(CMP) Article 38
Dans la première phrase de l'article L. 315-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après les mots : « au développement économique », sont insérés les mots : « , au développement de l'aménagement du territoire », et après les mots : « de la France et », sont insérés les mots : « , directement ou indirectement, ».

(CMP) Article 39
Le code civil est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du troisième alinéa de l'article 17-3, les mots : « le mineur de seize à dix-huit ans » sont remplacés par les mots : « tout mineur » ;
2° Le second alinéa de l'article 21-11 est ainsi rédigé :
« Dans les mêmes conditions, la nationalité française peut être réclamée, au nom de l'enfant mineur né en France de parents étrangers, à partir de l'âge de treize ans, la condition de résidence habituelle en France devant alors être remplie à partir de l'âge de huit ans. Le consentement du mineur est requis, sauf s'il est empêché d'exprimer sa volonté par une altération de ses facultés mentales ou corporelles constatée selon les modalités prévues au troisième alinéa de l'article 17-3. »

(AN1) Article 40
Dans le premier alinéa de l’article L. 313‑14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, après la référence : « L. 313‑11 », sont insérés les mots : « ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l’article L. 313‑10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article ».

(CMP) Article 41
Le premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. »

(AN1) Article 42
Le 3° du II de l’article L. 511‑1 du même code est ainsi rétabli :
« 3° Si l’étranger fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an ; ».

(AN1) Article 43
Les deux premiers alinéas de l’article L. 341‑3 du code du travail sont supprimés.

(CMP) Article 44
Dans la dernière phrase du dernier alinéa du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « son renouvellement » sont remplacés par les mots : « le renouvellement de la carte portant la mention “salarié” ».

(CMP) Article 45
L'article L. 322-3 du même code est abrogé.

(CMP) Article 46
- I. – Dans le quatrième alinéa (c) de l'article L. 341-9 du code du travail, après les mots : « regroupement familial », sont insérés les mots : « , du mariage avec un Français ».
II. – Dans le cinquième alinéa (3°) de l'article L. 5223-1 du code du travail tel qu'il résulte de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative), après les mots : « regroupement familial », sont insérés les mots : « , du mariage avec un Français ».

(CMP) Article 47
Dans la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 222-4, dans la troisième phrase du premier alinéa de l’article L. 222-6 et dans la première phrase de l’article L. 552-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « sur proposition de l'autorité administrative, et avec le consentement de l'étranger » sont remplacés par les mots : « prise sur une proposition de l'autorité administrative à laquelle l'étranger dûment informé dans une langue qu'il comprend ne s'est pas opposé ».

(CMP) Article 48
L'article L. 552-1 du même code est ainsi modifié :
1° À la fin de la deuxième phrase, les mots : « en présence de son conseil » sont remplacés par les mots : « ou de son conseil » ;
2° Après la deuxième phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« L'étranger peut demander au juge des libertés et de la détention qu'il lui soit désigné un conseil d'office. »

(CMP) Article 49
Dans le deuxième alinéa de l'article L. 222-3 du même code, les mots : « , en présence de son conseil s'il en a un, ou » sont remplacés par les mots : « ou de son conseil, s'il en a un, ».

(AN1) Article 50
Le même code est ainsi modifié :
1° Dans le dernier alinéa de l’article L. 313-14, les mots : « le ministre de l’intérieur, saisi » sont remplacés par les mots : « l’autorité administrative, saisie » ;
2° La dernière phrase du second alinéa de l’article L. 315-3 est supprimée ;
3° Dans l’article L. 624-4, les mots : « du ministre de l’intérieur ou du représentant de l’État dans le département, ou, à Paris, du préfet de police, » sont remplacés par les mots : « de l’autorité administrative » ;
4° À la fin de la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 625-4, les mots : « le ministre de l’intérieur » sont remplacés par les mots : « l’autorité administrative ».

(AN1) Article 51
Après le premier alinéa de l’article L. 111‑11 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cet observatoire est convoqué par le représentant de l’État dans la région d’outre-mer dans un délai de six mois à compter de la publication de la loi n° du relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile. Il se réunit une fois par semestre. »

(AN1) Article 52.
- I. – L’intitulé de la section 7 du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier est ainsi rédigé : « L’épargne codéveloppement ».
II. – Avant l’article L. 221‑33 du même code, sont insérés une division et un intitulé ainsi rédigés : « Sous-section 1. – Le compte épargne codéveloppement ».
III. – Après l’article L. 221‑33 du même code, il est inséré une sous-section 2 ainsi rédigée :
« Sous-section 2 « Le livret d’épargne pour le codéveloppement
« Art. L. 221-34. – I. – Un livret d’épargne pour le codéveloppement peut être proposé par tout établissement de crédit et par tout établissement autorisé à recevoir des dépôts qui s’engage par convention avec l’État à respecter les règles fixées pour le fonctionnement de ce livret.
« II. – Le livret d’épargne pour le codéveloppement est destiné à recevoir l’épargne d’étrangers majeurs ayant la nationalité d’un pays en voie de développement, figurant sur la liste de pays fixée par l’arrêté prévu au II de l’article L. 221‑33, titulaires d’un titre de séjour d’une durée supérieure ou égale à un an et fiscalement domiciliés en France, aux fins de financer des opérations d’investissement dans les pays signataires d’un accord avec la France prévoyant la distribution du livret d’épargne pour le codéveloppement.
« III. – À l’issue d’une phase d’épargne au cours de laquelle les sommes placées sur le livret d’épargne pour le codéveloppement sont bloquées pour une durée au moins égale à trois années consécutives et régulièrement alimentées dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, les titulaires d’un livret d’épargne pour le codéveloppement qui contractent un prêt aux fins d’investissement dans un pays signataire avec la France d’un accord prévoyant la distribution du livret d’épargne pour le codéveloppement bénéficient d’une prime d’épargne plafonnée dont le montant est fixé compte tenu de leur effort d’épargne. Les investissements ouvrant droit à la prime sont définis dans les accords signés entre les pays en développement et la France.
« IV. – Les conditions de transfert dans un autre établissement de crédit et de plafonnement des sommes versées sur le livret d’épargne pour le codéveloppement sont fixées par décret en Conseil d’État.
« V. – Les opérations relatives aux livrets d’épargne pour le codéveloppement sont soumises au contrôle sur pièces et sur place de l’inspection générale des finances.
« VI. – Le comité prévu au V de l’article L. 221‑33 examine périodiquement la cohérence des projets financés au travers du livret d’épargne pour le codéveloppement avec les différentes actions de financement du développement et formule des recommandations aux ministres concernés.
« VII. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

(CMP) Article 53
Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un livre IX ainsi rédigé :
« LIVRE IX « LE CODÉVELOPPEMENT
« Art. L. 900-1. – Le financement des projets de codéveloppement des migrants peut être assuré par la mise en œuvre des dispositifs prévus par les articles L. 221-33 et L. 221‑34 du code monétaire et financier, ci-après reproduits :
«“Art. L. 221-33. – I. – Un compte épargne codéveloppement peut être proposé par tout établissement de crédit et par tout établissement autorisé à recevoir des dépôts qui s'engage par convention avec l'État à respecter les règles fixées pour le fonctionnement de l'épargne codéveloppement.
«“II. – Le compte épargne codéveloppement est destiné à recevoir l'épargne d'étrangers ayant la nationalité d'un pays en voie de développement, figurant sur une liste de pays fixée par arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères, du ministre de l'intérieur, du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé du budget, et titulaires d'une carte de séjour permettant l'exercice d'une activité professionnelle, aux fins de financer des opérations dans leur pays d'origine telles que prévues au III.
«“III. – Les investissements autorisés à partir des comptes épargne codéveloppement sont ceux qui concourent au développement économique des pays bénéficiaires, notamment :
«“a) La création, la reprise ou la prise de participation dans les entreprises locales ;
«“b) L'abondement de fonds destinés à des activités de microfinance ;
«“c) L'acquisition d'immobilier d'entreprise, d'immobilier commercial ou de logements locatifs ;
«“d) Le rachat de fonds de commerce ;
«“e) Le versement à des fonds d'investissement dédiés au développement ou des sociétés financières spécialisées dans le financement à long terme, opérant dans les pays visés au II.
«“IV. – Les opérations relatives aux comptes épargne codéveloppement sont soumises au contrôle sur pièces et sur place de l'inspection générale des finances.
«“V. – Un comité examine périodiquement la cohérence des projets financés au travers du compte épargne codéveloppement avec les différentes actions de financement du développement et formule des recommandations aux ministres concernés. Ce comité est institué par arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères, du ministre de l'intérieur, du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé du budget.
«“VI. – Un décret fixe les modalités d'application du présent article, notamment les obligations des titulaires d'un compte épargne codéveloppement et des établissements distributeurs.
«“Art. L. 221-34. – I. – Un livret d'épargne pour le codéveloppement peut être proposé par tout établissement de crédit et par tout établissement autorisé à recevoir des dépôts qui s'engage par convention avec l'État à respecter les règles fixées pour le fonctionnement de ce livret.
«“II. – Le livret d'épargne pour le codéveloppement est destiné à recevoir l'épargne d'étrangers majeurs ayant la nationalité d'un pays en voie de développement, figurant sur la liste de pays fixée par l'arrêté prévu au II de l'article L. 221-33, titulaires d'un titre de séjour d'une durée supérieure ou égale à un an et fiscalement domiciliés en France, aux fins de financer des opérations d'investissement dans les pays signataires d'un accord avec la France prévoyant la distribution du livret d'épargne pour le codéveloppement.
«“III. – À l'issue d'une phase d'épargne au cours de laquelle les sommes placées sur le livret d'épargne pour le codéveloppement sont bloquées pour une durée au moins égale à trois années consécutives et régulièrement alimentées dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, les titulaires d'un livret d'épargne pour le codéveloppement qui contractent un prêt aux fins d'investissement dans un pays signataire avec la France d'un accord prévoyant la distribution du livret d'épargne pour le codéveloppement bénéficient d'une prime d'épargne plafonnée dont le montant est fixé compte tenu de leur effort d'épargne. Les investissements ouvrant droit à la prime sont définis dans les accords signés entre les pays en développement et la France.
«“IV. – Les conditions de transfert dans un autre établissement de crédit et de plafonnement des sommes versées sur le livret d'épargne pour le codéveloppement sont fixées par décret en Conseil d'État.
«“V. – Les opérations relatives aux livrets d'épargne pour le codéveloppement sont soumises au contrôle sur pièces et sur place de l'inspection générale des finances.
«“VI. – Le comité prévu au V de l'article L. 221-33 examine périodiquement la cohérence des projets financés au travers du livret d'épargne pour le codéveloppement avec les différentes actions de financement du développement et formule des recommandations aux ministres concernés.
«“VII. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État.” »

(AN1) Article 54
Le code du travail est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa de l’article L. 341‑4, les mots : « et sans s’être fait délivrer un certificat médical » sont supprimés ;
2° Après le même alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorisation de travail peut être retirée si l’étranger ne s’est pas fait délivrer un certificat médical dans les trois mois suivant la délivrance de cette autorisation. »

(CMP) Article 55. -
I. – L'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « dans la commune de Saint-Martin (Guadeloupe) » sont remplacés par les mots : « à Saint-Martin » ;
2° Dans le dernier alinéa, après les mots : « les dispositions des articles », est insérée la référence : « L. 512-1 et », et les mots : « dans la commune de Saint-Martin (Guadeloupe) » sont remplacés par les mots : « à Saint-Martin ».
II. – Dans l'article L. 514-2 du même code, les mots : « les communes du département de la Guadeloupe autres que celles de Saint-Martin » sont remplacés par les mots : « le département de la Guadeloupe et à Saint-Barthélemy ».

(AN1) Article 56
Dans l’article L. 831-1 du même code, après le mot : « “département” », sont insérés les mots : « ,“conseil général” » , et après les mots : « “collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon” », sont insérés les mots : « ,“conseil territorial” ».

(AN1) Article 57
Le Gouvernement dépose, dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, un rapport portant sur l’adaptation du régime d’entrée et de séjour à Saint-Pierre-et-Miquelon des ressortissants canadiens.

(AN1) Article 58
Le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour étendre, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, dans les îles Wallis et Futuna, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin et pour en tirer les conséquences sur l’ensemble du territoire de la République.
L’ordonnance est prise au plus tard le dernier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans les douze mois suivant la publication de la présente loi.

(CMP) Article 59
Le Gouvernement est autorisé, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à procéder, par ordonnance, à l'adoption de la partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
Le code de l'entrée et du séjour des étrangers dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie regroupe et organise les dispositions législatives relatives à l'entrée et au séjour des étrangers dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de la Constitution, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication de l'ordonnance sous la seule réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés et harmoniser l'état du droit.
L'ordonnance est prise au plus tard le dernier jour du douzième mois suivant la publication de la présente loi.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans les dix-huit mois suivant la publication de la présente loi.

(AN1) Article 60
L’ordonnance n° 2007-98 du 25 janvier 2007 relative à l’immigration et à l’intégration à Mayotte, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie est ratifiée.
Cette ordonnance est ainsi modifiée :
1° Dans l’article 36, la référence : « article 12 » est remplacée par la référence : « article 11 » ;
2° Dans l’article 61, la référence : « article 52 » est remplacée par la référence : « article 50 » ;
3° Dans l’article 68, la référence : « 11° de l’article 20 » est remplacée par la référence : « 11° de l’article 22 », et la référence : « article 16 » est remplacée par la référence « article 17 » ;
4° Dans le 3° de l’article 110, la référence : « 9° » est remplacée par la référence : « 5° ».

(CMP) Article 61
Le septième alinéa (4°) du I de l'article 19 de la loi n° 2007‑224 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer est complété par les mots : « et adoption de dispositions relevant du droit civil et du droit de l'action sociale et des familles, destinées à lutter contre l'immigration irrégulière à Saint-Martin ».

(AN1) Article 62
L’article L. 611‑3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il en est de même des bénéficiaires de l’aide au retour mentionnée au dernier alinéa du I de l’article L. 511‑1. »

(CMP) Article 63
La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est ainsi modifiée :
1° Le II de l'article 8 est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les traitements nécessaires à la conduite d'études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration selon les modalités prévues au 9° du I de l'article 25. La présentation des résultats du traitement de données ne peut en aucun cas permettre l'identification directe ou indirecte des personnes concernées. » ;
2° Le I de l'article 25 est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Les traitements nécessaires à la conduite d'études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration au sens du 9° du II de l'article 8. Lorsque la complexité de l'étude le justifie, la commission peut saisir pour avis un comité désigné par décret. Le comité dispose d'un mois pour transmettre son avis. À défaut, l'avis est réputé favorable. » ;
3° Le 7° du II de l'article 8 est ainsi rédigé :
« 7° Les traitements statistiques réalisés par les services producteurs d'informations statistiques définis par un décret en Conseil d'État dans le respect de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, après avis du Conseil national de l'information statistique et dans les conditions prévues à l'article 25 de la présente loi ; ».

(CMP) Article 64
- I. – La section 2 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail tel qu'il résulte de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative) est complétée par une sous-section 12 ainsi rédigée :
« Sous-section 12 « Congé pour acquisition de la nationalité
« Art. L. 3142-116. – Tout salarié a le droit de bénéficier, sur justification, d'un congé non rémunéré d'une demi-journée pour assister à sa cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française. »
II. – Le chapitre V du titre II du livre II du code du travail est complété par une section 8 ainsi rédigée :
« Section 8 « Congé pour acquisition de la nationalité
« Art. L. 225-28. – Tout salarié a le droit de bénéficier, sur justification, d'un congé non rémunéré d'une demi-journée pour assister à sa cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française. »

(CMP) Article 65- I. – L'article L. 723-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est applicable à Mayotte, en Polynésie française, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie.
II. – L'article 20 63 de la présente loi est applicable à Mayotte, en Polynésie française, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Immigration: signature d'un accord entre le Congo et la France

Immigration: signature d'un accord entre le Congo et la France
AFP 25.10.07

Le Congo et la France ont signé jeudi à Brazzaville un accord sur la "gestion" des "flux migratoires" et le co-développement, afin de "renforcer les liens anciens et solides" entre ces deux pays, selon un correspondant de l'AFP.

Cet accord comprend trois volets: "l'organisation de la migration légale, la lutte contre l'immigration irrégulière, le co-développement et le développement", a souligné le ministre français de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Co-développement, Brice Hortefeux, signataire de l'accord avec le ministre congolais des Affaires Etrangères, Basile Ikouebé.

Cet accord de partenariat "appartient à une nouvelle génération d'accords concernant les questions migratoires selon une conception très équilibrée qui tient compte à la fois des impératifs et des réalités des pays d'origine, ainsi que des impératifs et des réalités des pays de destination", a précisé M. Hortefeux, lors d'une conférence de presse.

Selon lui, les personnes qui contribuent par leurs fonctions au développement des relations franco-congolaises, disposeront, à travers cet accord, de facilités accrues d'obtention de visas de circulation valables jusqu'à cinq ans pour les voyages qu'elles seront amenées à effectuer de façon régulière entre Brazzaville et Paris.

Les diplomates bénéficieront pour leur part d'une liberté totale de circulation pour une durée de deux ans dans un premier temps. Les étudiants auront dans cet accord de nouvelles possibilités pour prolonger leur formation par une expérience professionnelle.

Les jeunes travailleurs, selon M. Hortefeux, pourront ainsi effectuer des séjours pouvant aller jusqu'à 18 mois.

M. Hortefeux, qui a effectué une visite de 24 heures à Brazzaville et à Pointe-Noire, la capitale économique du Congo où il a rencontré le président Denis Sassou Nguesso, a indiqué que "l'accord conclu (avait) été conçu de façon à mieux organiser les échanges des populations entre la France et le Congo".

Après le Gabon et le Sénégal, le Congo est le troisième pays africain à signer un tel accord avec la France.

Au cours de sa campagne électorale avant son élection à la présidence française en mai, M. Sarkozy a souvent insisté sur le fait que l'immigration devait être maîtrisée et "choisie".

Le ministre congolais des Affaires étrangères a souligné, pour sa part, que "la portée (de l'accord) va au-delà du cadre bilatéral, puisqu'aussi bien aux Nations unies et à l'Organisation internationale des migrations (OIM) que dans le cadre du partenariat Afrique-Europe, la question des migrations, associée à la problématique du développement, constitue une préoccupation majeure au coeur des débats souvent riches, parfois passionnés".

Les autorités congolaises ont également indiqué qu'elles étaient en train d'élaborer de nouveaux passeports sécurisés, "des documents fiables pouvant nous permettre de gérer (..) les flux migratoires. (...) Ces documents seront mis en circulation d'ici la fin de l'année en cours", a annoncé M. Ikouebé.

"Les flux migratoires entre Brazzaville et Paris sont déjà maîtrisés et ne donnent plus lieu qu'à très peu de mesures de non admission. Résultat, moins d'une quarantaine de personnes sur 41.800 passagers, sont refoulées par an, alors qu'en 2005 les refoulements se comptaient par centaines par an", a de son côté précisé le ministre congolais de la Sécurité et de l'Ordre Public, Paul Mbot.

lundi, octobre 22, 2007

Immigration qualifiée: Bruxelles présente mardi son projet de "carte bleue"

Immigration qualifiée: Bruxelles présente mardi son projet de "carte bleue"
AFP 22.10.07 | 16h33

Les immigrants très qualifiés pourraient venir travailler dans l'Union européenne dans des conditions un peu plus favorables, selon le projet controversé de "carte bleue" que proposera mardi la Commission européenne.

L'objectif de la Commission est d'attirer vers l'UE ces travailleurs qui vont actuellement de préférence vers les Etats-Unis, le Canada ou l'Autralie.

Baptisée "carte bleue" en référence à la couleur du drapeau européen - même si dans les faits elle ne sera pas bleue - ce projet s'inspire de la "carte verte" américaine, le sésame pour l'immigrant allant travailler aux Etats-Unis.

L'avantage pour l'immigrant serait d'avoir un permis de séjour et de travail de deux ans renouvelable, délivré sous les mêmes conditions dans chacun des 27 pays membres.

Après cette période initiale, il pourrait aller travailler dans les mêmes conditions dans un autre Etat, selon la proposition de directive de la Commission qui nécessite l'accord des 27 Etats membres pour être adoptée dans l'état actuel des traités.

Mais les conditions posées à l'immigrant potentiel restent strictes: un diplôme reconnu, au moins trois ans d'expérience professionnelle et une offre d'emploi qui n'a pu être pourvue par un travailleur communautaire.

Pour éviter un dumping social redouté par les syndicats, la Commission propose que son salaire soit supérieur à trois fois celui du salaire minimum du pays où il travaillera.

Actuellement, ces immigrés hautement qualifiés seraient entre 34.000 et 74.000, selon les estimations de la Commission portant sur 16 des 27 Etats membres.

Selon l'étude d'impact réalisée par la Commission, les Etats membres ont déjà des législations pour les immigrants très qualifiés mais le plus souvent limitées à des cas spécifiques (artistes, chercheurs, transferts au sein d'une entreprise).

En outre, la diversité des conditions d'admission "limite leur mobilité dans l'UE", note l'étude.

La Commission sait qu'elle marche sur des oeufs car les Etats ont des marchés du travail différents, et décident seuls du nombre d'immigrés. Beaucoup sont farouchement attachés à cette compétence, comme l'Allemagne ou l'Autriche.

"Nous n'avons pas besoin de cette +carte bleue+. Je ne veux pas que notre politique du marché du travail soit sapée par des réglementations européennes", a déjà déclaré le chancelier autrichien Alfred Gusenbauer.

Bruxelles, principal soutien au développement en Afrique, cherche aussi à désamorcer les critiques de ceux qui l'accusent de vouloir accélérer une fuite des cerveaux déjà considérable.

La carte permettrait ainsi au travailleur de revenir en Europe sans recommencer les démarches s'il voulait ou devait retourner chez lui. Selon la Commission, cela devrait faciliter les allers-retours avec le pays d'origine et éviter une installation définitive de l'émigrant dans l'UE.

dimanche, octobre 21, 2007

L’usage du téléphone portable par les migrants en situation précaire

L’usage du téléphone portable par les migrants en situation précaire

mercredi 10 janvier 2007, par Dana Diminescu, Source : www.ticm.msh-paris.fr


Circuler tout en gardant le contact : l’usage du téléphone cellulaire a rendu cela facile. Les sans-papiers de Saint-Bernard à Paris et les Roumains immigrés économiques illégaux ont, malgré le fait qu’ils s’ignorent le plus souvent, au moins un point en commun : la précarité de leur situation. Les exemples concrets décrits ici montrent l’impact du portable sur le combat des uns et sur les activités économiques des autres, et semblent indiquer qu’il a significativement modifié les mécanismes d’insertion sociale.

Publié dans Hommes et Migrations, n°1240, 2002., pp. 66-81.

Le contexte actuel de politique migratoire européenne a favorisé la promotion de migrants “en situation irrégulière” en marge de l’État de droit et de l’État social. Condamnés par les lois anti-immigration, ces migrants (dont la présence n’a cessé d’augmenter) ne pouvant fournir aucun justificatif d’appartenance à une entreprise ni même à un espace local de résidence, se sont montrés particulièrement habiles à l’usage du téléphone portable. Qu’il s’agisse d’immigrés sans papiers, en difficulté depuis longtemps en Occident, ou de migrants clandestins et pendulaires venus récemment de l’Est européen ou encore, de commerçants “à la valise” opérant dans les bazars plus ou moins informels d’une Europe sans frontières, l’équipement mobile s’est avéré indispensable pour ces gens dans les pays de destination ainsi que pour le maintien du lien familial à distance. Ces migrants étant souvent à l’origine de l’implantation du téléphone portable chez eux, ils sont devenus également les porteurs anonymes du développement local, dans les aires les plus dépourvues de moyens de communication.

Tous les courants de réflexion sur le phénomène migratoire contemporain (et notamment les théories des réseaux transnationales) s’accordent sur le fait que les migrants d’aujourd’hui sont les acteurs d’une culture de lien, que les migrants ont fondé et qu’ils entretiennent dans la mobilité. Auparavant à l’état latent, mais propre à tous les groupes qui se déplacent, cette culture du lien est devenue visible et très dynamique une fois que les migrants ont commencé à utiliser massivement les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Ainsi, aujourd’hui, il est de plus en plus rare de voir les migrations comme un mouvement entre deux communautés distinctes, appartenant à des lieux éloignés et marquées par des relations sociales indépendantes l’une de l’autre. Il est au contraire de plus en plus fréquent que les migrants parviennent à maintenir à distance et à activer quotidiennement des relations qui s’apparentent à des rapports de proximité. Le lien “virtuel” – par téléphone ou par mail – permet aujourd’hui plus et mieux qu’avant d’être présent à la famille, aux autres, à ce qui est en train de leur arriver, là bas, au pays ou ailleurs. Le déraciné, en tant que figure paradigmatique du monde migrant s’éloigne et fait place à une autre figure, encore mal défini mais dont on connaît qu’elle corresponde à un migrant qui se déplace et fait appel à des alliances à l’extérieur de son groupe d’appartenance, sans pour autant se détacher de son atome (réseau) social d’origine.

En nous appuyant sur les données d’une recherche menée dans le cadre du programme “NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication), modes de vie, espaces et temporalités de la vie urbaine”, cet article propose d’ethnographier l’usage du téléphone portable par les migrants vivant dans un environnement précaire, d’appréhender leurs modes d’acquisition de l’équipement mobile et les manières dont celui-ci s’insère dans ce milieu, ainsi que d’en analyser les effets sur les pratiques migratoires.

Le portable, un instrument de lutte

Le 18 mars 1996, trois cents Africains occupent l’église Saint-Ambroise à Paris pour demander leur régularisation. Quelques mois plus tard, lorsque la police les expulse, ils sont installés à l’église Saint-Bernard. Madjiguène Cisse, déléguée et porte-parole du “collectif de Saint-Bernard”, raconte dans son livre Parole de sans-papiers [1], la naissance du mouvement et son affirmation dans le paysage politique français et européen. Elle montre comment ces derniers, précaires parmi les précaires, ont défié cette “fatalité” et lutté contre une politique qui encourageait la clandestinité de longue durée. C’est notamment un sous-chapitre, intitulé “Le poulet et le portable”, qui a attiré notre attention sur le rôle joué par le téléphone mobile dans le déroulement et l’instrumentalisation des événements de l’église Saint-Bernard, et qui nous a incité à mener une enquête rétrospective. “Pour moi, écrit Madjiguène Cisse, le voisinage de pratiques animistes et de la technologie de pointe, à travers le site Internet, l’Audiotel, le téléphone cellulaire, signe distinctif du porte-parole des sans-papiers, était comme une représentation de notre lutte" [2]. Si, dans son témoignage, Madjiguène Cissé évoque “le poulet et le portable” comme des symboles héraldiques inscrits sur le blason des sans-papiers, c’est pour mieux souligner le fait que les migrants d’en bas peuvent bénéficier des innovations techniques de la communication et les manipuler au même titre que les citoyens de plein droit des pays développés.

Toutefois, réduire l’usage du portable à une fonction stricte de représentation serait se fourvoyer. Cela est manifeste : dans la lutte des sans-papiers, l’instrument répond essentiellement à une fonction stratégique s’apparentant au registre des armes. Dans un article écrit dans la lignée de la pensée de Deleuze et Gauttari, Chantal de Gournay distingue deux approches des nouvelles technologies mobiles. Dans le cas des sédentaires, elles sont des simples outils qui accompagnent le déplacement, soutiennent et prolongent l’acte productif (le travail). En revanche, dans le cas des nomades, elles deviennent une arme qui leur permet de faire de leurs déplacements apparemment erratiques des instruments de force, acquerrant ainsi une fonction stratégique. De son point de vue, la nature des médias est plus proche de la logistique que de l’outil : “On y a recours, moins pour fabriquer de la richesse ou un contenu formel, que pour exploiter des opportunités, occuper le terrain, être vu" [3].

Or, c’est précisément ce qui s’est passé sur les dalles de l’église Saint-Bernard. Dans le creuset des mouvements des sans-papiers, la dimension stratégique du téléphone portable a commencé à fonctionner une fois que le syndicat Sud-PTT a apporté son aide et doté les délégués d’un téléphone portable, à la place des talkie-walkie utilisés dans la coordination traditionnelle des manifestations de rue. Au-delà de l’aspect organisationnel, cet instrument est devenu le médium par lequel plusieurs négociations avec les pouvoirs publics ont eu lieu, et par lequel le contact avec la presse est demeuré ouvert. C’est également par ce biais que les mesures efficaces ont été prises dans les moments de tension. Le trafic téléphonique était intense dans les deux sens : “Le téléphone portable était tout le temps allumé, à tout moment quelqu’un d’important pouvait appeler. Dans les réunions, c’était un désavantage, personne ne se synchronisait plus.” (Mogniss Abdallah, animateur de l’agence IM’Media). “Les délégués téléphonaient et étaient appelés. Si la police nous contrôlait, nous aussi nous avons eu des informateurs qui nous disaient si quelque chose se préparait en-dehors de l’église ; nous aurions ainsi pu demander l’aide tout de suite au comité de soutien…” (A. B., participant).

Une tribune virtuelle devenue exclusive

Cet activisme relationnel des porte-parole des sans-papiers, entretenu par téléphone portable, a induit au moins deux réactions contradictoires, dont l’une venait des sans-papiers eux-mêmes. Bien qu’il était légitime que les délégués, en qualité de représentants élus, parlent au téléphone portable, leur monopolisation de la circulation de l’information due à la nature même de la machine (il serait impossible que plusieurs personnes manipulent la machine en même temps), les a éloignés du projet initialement prévu par le syndicat Sud-PTT, qui envisageait un usage collectif de cet équipement mobile en dehors du fonctionnement organisationnel. Autrement dit, bien que mis à la disposition de l’ensemble des sans-papiers de Saint-Bernard, ces deux ou trois portables n’ont jamais fonctionné en tant que téléphones de la communauté ; de ce fait, ses membres se sont sentis exclus de la tribune qui est devenue virtuelle. Technologiquement conçu comme un corps communiquant à usage individuel, et intégré en tant que tel par les délégués, le téléphone portable a fini par imposer ses propres règles à la communauté. “Les délégués monopolisaient les cellulaires. Une fois, le syndicat a voulu installer une cabine téléphonique gratuite à l’usage de tous dans le hall de la BPP faubourg du Temple, mais finalement après des discussions on a préféré les téléphones portables. En réalité, les délégués ont été tentés de s’approprier personnellement le portable comme un instrument de pouvoir en détriment de l’usage collectif.” (Mogniss Abdallah). Le téléphone portable a fini par devenir une nouvelle machine de guerre collective, mais aussi un symbole de pouvoir individuel.

La deuxième contradiction venait du regard extérieur. Avant que le téléphone portable ne devienne un outil de consommation de masse, imaginer un migrant dans une situation précaire doté d’un équipement NTIC semblait extravagant. “Quand j’ai été arrêtée, après que les policiers aient envahi Saint-Bernard, deux événements m’ont parue significatifs. Le premier, c’est la manière dont j’ai été mise nue, par des femmes policiers, devant ma fille. Il est évident que le but recherché était de m’humilier, de me faire craquer. Je me suis donc déshabillée sous les sarcasmes et les plaisanteries plus ou moins douteuses. […] Mais la nature des railleries, des sarcasmes et des quolibets en disait également long sur l’état d’esprit dans la police : ‘Ah ! Ah ! Elle ne l’a plus son portable, la porte-parole’. Le portable était devenu un symbole de la modernité auquel, de toute évidence, comme étrangère, comme africaine, comme noire, comme négresse, je n’avais pas droit : ‘ils viennent à peine de descendre de leurs arbres, et ils ont déjà des portables dans leur main’ [4]. Dénudée, la porte-parole perd dans cet épisode son bouclier social et reprend le chemin des sans-voix , car lui enlever le téléphone portable, ce n’est pas seulement la rendre vulnérable, c’est également réduire à néant la parole de tous les sans-papiers et rendre invisible leur lutte.

Un instrument d’intégration ?

Depuis, l’usage du téléphone portable s’est généralisé parmi les sans-papiers. En effet, même si leur coordination nationale, dépourvue d’un local, répond toujours à un numéro de mobile et que l’organisation des manifestations se fait en activant les réseaux des cellulaires des déléguées des sans-papiers, l’usage de l’équipement mobile est devenu une pratique courante chez les migrants, le numéro de portable faisant office d’adresse anonyme. “Tous les migrants sans-papiers qui passent aujourd’hui à la permanence du Gisti laissent un numéro de téléphone portable”, (P. Mony, Gisti). À la différence des pratiques spécifiques du début du mouvement des sans-papiers, lorsque les rares machines étaient connectées à l’espace public et concentrées entre les mains des porte-parole et des délégués qui instrumentalisaient leur lutte à la lumière des caméras, l’usage massif du téléphone portable à caractère individuel a réorienté le champ communicationnel vers l’espace domestique et le marché du travail. Cela a favorisé la clandestinité, prolongée sous forme de comportements migratoires différents et discrets, dans une logique d’accommodation à la société d’accueil et d’intégration par le bas.

Un autre groupe de migrants, très attaché à l’équipement mobile, est celui des “faux touristes” venu de l’Est européen pour chercher un emploi temporaire. Cette nouvelle promotion de travailleurs migrants en situation irrégulière a manifesté peu d’intérêt pour le mouvement des sans-papiers, et plus généralement pour tout projet d’intégration institutionnelle. Les principaux débouchés recherchés par ce groupe à l’étranger sont “des solutions”, à mi-chemin entre la pauvreté et le “système D” : petits commerces, aide domestique, différents travaux dans les secteurs de l’agriculture et du bâtiment. La dimension temporaire de leur projet de mobilité, la perspective d’une Europe élargie et le fait qu’ils sont tolérés et souvent préférés sur le marché du travail aux immigrés du Sud ou de l’Asie, explique partiellement leur manque d’enthousiasme pour une demande de régularisation et leur absence de prise de conscience de leurs droits civiques et sociaux. Pourtant, cette migration se signale par une forte dose d’illégalité – consécutive d’un franchissement clandestin de frontière, d’un dépassement de la durée de séjour autorisée, ou encore d’une activité non déclarée –, et elle reproduit de près les mêmes symptômes d’accommodation à la société d’accueil que l’immigration des autres sans-papiers.

C’est suite au flux de population arrivé après 1989 de l’Est, et notamment de Roumanie, que l’on assiste dans les années quatre-vingt-dix, dans toute l’Europe, à un retour des squats, des bidonvilles, des caravanes, et plus généralement à un réinvestissement du logement insalubre souvent loué clandestinement. Cette situation, générée par la crise de la politique migratoire des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix n’est pas pour autant une redite du moment des bidonvilles de Nanterre dans les années soixante.

Maison abandonnée, foyer de jour, logement collectif loué clandestinement, hôtel “une demi-étoile”, église, centre de rétention, carcasse de vieille voiture, hutte rudimentaire, tous ces espaces dépourvus d’un équipement de communication fixe ont cessé d’être des espaces isolés, des no man’s land communicationnels, au moment de l’arrivée du téléphone mobile dans le monde migrant. Son détachement par rapport à une prise de branchement et l’avantage de capter et d’émettre n’importe où sur le territoire sont devenus de précieux atouts pour un monde itinérant, pénalisé par une localisation précaire et une invisibilité institutionnelle.

Un outil indispensable pour trouver du travail

Dans la communauté des migrants roumains arrivés en France au début des années quatre-vingt-dix, l’acquisition du téléphone portable marque un moment précis. Ces paysans saisonniers du Nord de la Roumanie sont entrés dans le quotidien des Français grâce à la vente des journaux de rue (notamment de l’Itinérant). Aux portes des magasins et des Postes, aux carrefours, toujours au rendez-vous, les Roumains ont réussi à fonder un réseau de diffusion des journaux de rue très efficace et à s’accrocher dans la société française. Au bout de quelques années, chaque vendeur a trouvé “son nid”, ce qui s’est traduit par l’établissement d’un lien avec “son Français”, l’homme-source qui conforte car il protège, garantit la circulation et offre son propre réseau et par cette voie le marché du travail. Si dans un premier temps l’exploitation de cette presse de la précarité a surpris par “l’usage économique d’un handicap social”, il est néanmoins vrai qu’elle a eu une fonction d’intégration pour ces migrants dans la société française. L’apparition du téléphone mobile, en 1997, coïncide avec le début de ce processus d’intégration par le bas, et marque les nouveaux systèmes de connexion à la société française. Les femmes sont les premières à expérimenter le passage de l’espace public (la vente de journaux) à l’espace domestique en utilisant le support d’un équipement mobile : elles quittent les rues pour travailler dans les maisons. “La permanence” devant les supermarchés a été remplacée par une délégation de présence à la boîte vocale d’un cellulaire. Le répondeur, ce secrétariat du pauvre, conduit les usagers à rationaliser leurs contacts et à se comporter comme des “pros” de la communication. Désormais, le recrutement pour un travail domestique se fait par téléphone mobile, offert dans la majorité des cas par “leur Français”. "Avant la cabine téléphonique dominait. Les premiers téléphones mobiles sont apparus chez les voleurs à la tire. Mais les hommes ne se sont pas jetés sur les machines. Trop chères. C’était en 1996. Une année plus tard, les Sagem, Ericsson, Motorola et Nokia ont commencé à se vendre à partir de cinq cents francs. Et c’est ma femme qui a eu le premier téléphone portable, en 1998 ; à l’époque nous avons loué clandestinement avec vingt-cinq autres villageois un espace chez une Serbe à Villejuif. Ma femme vendait très bien les journaux, mais elle a trouvé aussi une Française qui lui achetait des journaux de temps en temps et qui lui avait proposé également du ménage chez elle. C’est cette dame qui lui a acheté le téléphone, sur sa carte d’identité, car nous étions tous sans-papiers. Sans carte d’identité ni compte en banque, c’est très difficile d’acheter un téléphone mobile. Souvent les patrons qui nous employaient prenaient sur leur compte le téléphone. Pour d’autres, ça a été le système D : soit ils ont profité d’un domicile fixe de quelqu’un, soit ils ont spéculé sur le fait que les vendeurs de téléphone ne connaissaient pas avec précision les normes de la délivrance du téléphone et de la carte téléphonique ; nous sommes tous sur des cartes… et nous les changeons souvent. En effet, tout le monde [les vingt-cinq cohabitants, ndlr] a utilisé le téléphone de C [son épouse] ; nous étions seulement appelés et nous n’utilisions que la messagerie. Rarement, et seulement dans des situations d’urgence, nous avons osé appeler. Mais le téléphone est devenu important car nous avons commencé à trouver du travail parce que les patrons pouvaient nous joindre. Ma femme ne prenait pas, ou presque jamais, le téléphone avec elle en allant vendre les journaux. De toute façon, elle le tenait éteint. Elle avait honte de ce que les gens pouvaient penser de ce ‘luxe’.” (I. C., migrant, 50 ans).

Après un début modeste, le téléphone mobile s’impose donc comme instrument de communication prioritaire. “Six mois plus tard, une autre femme a eu un téléphone portable, elle aussi a trouvé du ménage. Après une année, il y a eu une promotion et chaque famille s’est équipée d’un téléphone mobile, toutes mes cousines ont désiré un téléphone portable, même s’il n’y a pas toujours une motivation de travail derrière. Quand ma femme est rentrée dans le village, elle a pris son téléphone portable avec elle, puisque les machines ont commencé à fonctionner également en Roumanie. Le plus souvent, quand celui qui a ‘le cellulaire’ part à la maison, s’il n’a pas chez lui [dans le village] un téléphone, il le prend avec lui ; sinon, il laisse le téléphone au conjoint, aux enfants ; ou il part avec et le ramène quand il revient en France. Le mien fonctionne ici et également en Roumanie, je l’ai acheté à Auchan et je l’ai décodé, il y a des ateliers partout : à Porte Maillot, à Père Lachaise [quartiers parisiens, ndlr]… (I. C. migrant, 50 ans).

Un téléphone d’abord communautaire

Le besoin de se connecter à la société d’accueil, notamment dans le cadre de la recherche d’un travail, n’a pas été le seul argument d’appropriation des systèmes de technologie mobile par les migrants roumains. Le trafic massif des communications vers le pays d’origine, géré habituellement par le réseau de la téléphonie publique, a connu quelques interstices notables. La première période, correspondant au moment où la cabine téléphonique a été remplacée par le téléphone portable pour les communications internationales, coïncide avec l’apparition des “radiesthésistes des lignes des fréquences libres” : ceux-ci, simples migrants, en essayant de parler à l’étranger d’un poste mobile, ont trouvé par accident des “trous” dans les systèmes d’émission SFR en automne 1996. D’après leurs explications, probablement naïves, ces “trous” correspondraient à un découpage dans le territoire des “différentes zones ombrées par une émission gratuite d’un satellite”. “Ce sont les gens de Camarzana [village de l’Oas, Nord-Ouest de la Roumanie, ndlr] qui ont découvert la zone et ils faisaient un grand secret de leur trouvaille.” (I. C., migrant, 47 ans). Les “zones” – ainsi qu’ils ont appelé les périmètres à communication gratuite – “se déplaceraient avec le satellite”. Dans la zone, il y aurait eu un centre, un périmètre plus fort en signal, et “si tu prenais une fréquence par exemple à Pierrefitte à côté de l’hôpital, tu pouvais parler des heures au téléphone, la carte ne se déchargeait pas ; parfois je rentrais à Paris en voiture sans interrompre la communication. Et dès que j’arrivais sur le périphérique, la communication tombait. J’ai parlé comme ça des heures en Roumanie. La zone a été captée au début place de la République et n’a pas résisté plus de deux mois. Tu connais le feu en face de Tati, ça a été là notre centrale.” (V. F. migrant roumain, 37 ans).

Le soir, après que les supermarchés devant lesquels ils vendaient les journaux de rue aient fermé leurs portes, ils se déplaçaient et se retrouvaient dans le périmètre de “la zone”. Les téléphones étaient moins nombreux que les candidats à la communication, deux ou trois machines pour une dizaine de personnes. Ces migrants logeaient dans différentes maisons abandonnées dans les banlieues parisiennes. Ils étaient tous originaires de la même région, le pays d’Oas. Les zones réunissaient généralement les membres d’un même village qui se donnaient rendez-vous le soir avec les propriétaires des téléphones portables. Leur trafic communicationnel était si intense que souvent, la centrale archaïque (manuelle) du village se bloquait. Mais “la zone n’a pas duré plus d’un à deux mois. Elle se déplaçait tout le temps. Après, on l’a capté encore à Marseille, puis elle a définitivement disparu. Moi, j’ai parlé comme ça la dernière fois dans un parking sur l’autoroute qui va à Orléans. Ensuite, pour parler en Roumanie, je suis revenue à la cabine.” (A. D., migrante, 34 ans).

Bien que la communication, grâce à cette méthode, ait été temporairement gratuite, l’introduction, la propagation en masse et, implicitement, l’usage individuel du téléphone portable, sont restés longtemps assez timides. Considéré comme un outil cher et susceptible de laisser des traces de leur présence irrégulière, il ne s’est introduit que lentement dans la vie quotidienne et privée des migrants, à la différence du téléphone mobile à fonction communautaire, qui lui, a eu une belle carrière. À la fin des années quatre-vingt-dix, chaque squat s’est en effet doté d’un cellulaire. Il fonctionnait comme un téléphone dans un régime semi-public : chaque habitant pouvait être appelé de l’extérieur, et la boîte vocale était devenue la boîte postale de tout le squat. “Tout le monde utilisait dans le squat mon téléphone ; Il s’est déchargé vite et ça a été un problème, car dans les squats nous n’avons pas d’électricité et j’ai été obligé de trouver toutes sortes de solutions ailleurs pour le recharger.” (I. C., migrant, 50 ans). “Jusqu’en 1998, nous avons seulement reçu des messages et nous avons consommé le crédit des cartes téléphoniques avant la date d’expiration ; il n’y avait personne d’abonné. Quand nous devons communiquer, nous n’avons qu’à appeler de la cabine téléphonique.” (M. P., 47 ans).

La filière des téléphones de squats correspondait aussi au réseau de diffusion des journaux de rue. “Chaque dimanche soir, B. m’appelait sur mon portable et moi je lui disais combien de journaux il nous faut amener ; nous avons toujours acheté les journaux ensemble, cela nous revenait moins cher. D’habitude, on les achetait pour deux francs et on les vendait dix francs. Les villageois venaient et me disaient : je veux disons cent cinquante exemplaires, un autre peut-être trente seulement, chacun selon combien il pensait en vendre. Moi, je faisais les comptes et je transmettais à B. le nombre de journaux qu’il nous fallait pour tout le squat. Puis B. venait nous les amener directement.” (V. C., migrant, 39 ans).

Ce système d’organisation du travail en réseau s’est ensuite diversifié. Il a été transféré vers d’autres activités de colportage et même dans les services de transport entre la France et la Roumanie. Sans le support mobile, les activités des migrants ne se seraient probablement pas autant développées et ne seraient pas devenues aussi rentables. Toutefois, son impact sur la vie économique et sociale des migrants ne s’est pas arrêté aux frontières géographiques du pays d’accueil. “J’ai construit toute ma maison [à Certeze, un village de l’Oas, ndlr] d’ici [de Paris], par téléphone.” (V. F., migrant, 37 ans). En effet, l’organisation et la coordination de leurs affaires par l’intermédiaire du cellulaire a dépassé largement les frontières nationales, surtout lors des manipulations délicates et à la limite de la légalité.

Bien que l’acquisition du téléphone portable se soit multipliée et privatisée – aujourd’hui chaque membre de la communauté est équipé d’un cellulaire – l’usage collectif n’a pas disparu. Les dernières trouvailles exploitent les dysfonctionnements de l’outil ou de l’opérateur et non plus ceux des réseaux, comme cela a été le cas avec les “radiesthésistes de fréquence libre”. Il y a une grande diversité des méthodes de manipulation des machines et, bien qu’elles soient considérées “secrètes”, en réalité tout le monde en profite. Dès qu’une opportunité s’offre sur le téléphone de X, tous les habitants du squat s’en servent. "Nous parlons des heures. En 1999, Bouygues a eu des problèmes, le système ne pouvait pas contrôler les crédits, une carte Bouygues pouvait alors être utilisée jusqu’à un débit de deux à trois mille francs… On savait tous ce qui se passait passé dans le village. Une fois, j’ai laissé mon téléphone portable faire le tour du squat chacun téléphonait chez lui ; nous avons tous rigolé, à un moment une femme de notre village a appelé elle aussi les siens et a participé ainsi en direct à l’accouplement de ces moutons.” (I. C., migrant, 50 ans).

Soumis à l’impératif de parler beaucoup et fréquemment à la famille restée à la maison tout en étant contraints par les coûts élevés des communications internationales, les migrants “chassaient” toute situation avantageuse dans les systèmes communicationnels, fixes ou mobiles. Promotions, passage aux messages écrits, et in extremis exploitation des failles dans le réseau, sont recherchés avec zèle pour satisfaire la compulsion de la proximité et sont à l’origine de la production d’une co-présence au moins intermittente, utile et nécessaire à la maintenance des relations familiales et communautaires.

La rationalisation des pratiques du téléphone portable se dessine clairement à travers quelques règles de base dans l’usage et la manipulation par le groupe de migrants roumains : 1- l’utiliser comme adresse (répondeur inclut) ; 2- chercher à tout moment à exploiter les failles dans le fonctionnement des opérateurs pour parler le plus longtemps possible pour le moins cher possible ; 3- équiper d’un téléphone portable les membres de la famille restés au pays également ; 4- décoder le téléphone pour qu’il fonctionne aussi bien en France que dans leur pays, quel que soit l’opérateur.

Un instrument de commerce

Cette effervescence communicationnelle s’est transférée immédiatement au commerce. Les migrants ne se sont plus contentés de consommer des unités, ils ont vite saisi ce marché comme une double opportunité économique. Que ce soit dans le pays d’accueil, qui leur refusait une inscription institutionnelle, ou chez eux, où il n’y avait pas d’équipement téléphonique, le téléphone mobile s’est avéré l’innovation technologique la plus adaptée pour rentabiliser le projet de mobilité de ces migrants et pour garder le lien avec la famille restée sur place. Ce besoin a été immédiatement identifié en tant que marché potentiel et exploitable. D’autre part, ils ont fait jouer leur mobilité et l’avantage d’être présents dans deux pays à la fois. À ce propos, ils ont mis en concurrence les filières officielles de diffusion d’équipements mobiles en trafiquant les promotions d’un pays à l’autre. L’affaire – à ses débuts une spécialité de quelques débrouillards – est devenue une source économique très profitable qui a mobilisé d’autres secteurs d’activité et d’autres acteurs. Plusieurs services se sont développés, en liaison directe avec le marché des portables : les transports, les opérateurs de téléphonie mobile, les services de décodage, les intermédiaires d’achat, les activités de collecte et de vente de cartes téléphoniques à la criée…

La plus insolite exploitation économique du téléphone portable recensée dans nos notes de terrain remonte aux années 1996-1998, dans un bazar de Novi Beograd, à proximité de la capitale serbe, pendant l’embargo imposé à l’ex-Yougoslavie. La chute des régimes communistes et le glissement vers la société de consommation ont entraîné des mobilités transfrontalières importantes en flux de population et de capital. À l’image d’une “économie de fourmis”, dans l’espace des anciens pays PECO, ont émergé des marchés proches de la configuration des bazars et des routes commerciales nouvelles. Le marché de Novi Beograd, connu également sous le nom de “bazar roumain”, est apparu au cours de cette période marquée par la carrière du commerce de valise et le trafic d’essence. Les migrants venaient en “faux touristes”, et tentaient de vendre dans les espaces consignés leurs marchandises. À la marge de la capitale serbe, bien qu’une taxe d’entrée ait été imposé par l’État (mais aussi par différents réseaux mafieux), les conditions de vente étaient plus que pénibles. Aucune infrastructure commerciale, sanitaire, ni même communicationnelle n’a été prévue. Cette dernière carence a été ingénieusement exploitée. Une dame à l’âge de la retraite s’est promenée parmi les migrants en leur proposant les services de son téléphone mobile. Elle connaissait tous les indicatifs des départements et des grandes villes de Roumanie et manipulait la machine. Dans une main le téléphone portable, dans l’autre, une serviette imbibée d’alcool médicinal pour désinfecter après chaque communication le cellulaire, et à la ceinture un sac discret à monnaie, la petite dame incarnant ainsi l’image insolite d’une téléphoniste moderne à la tête d’une centrale mobile est devenue, parmi les milliers d’usagers migrants, une légende vivante à Novi Beograd.

Un moyen de pallier les déficiences du réseau fixe

L’autre exemple que nous allons évoquer reflète la capacité des migrants sans aucun passé commercial à organiser des filières marchandes et à s’adapter très vite aux opportunités offertes par les nouvelles technologies de communication. Fermés longtemps à la circulation et la communication au-delà du rideau de fer, les pays de l’Est deviennent, après la chute des régimes communistes, de grands marchés pour toutes les technologies médiatiques. Les opérateurs de téléphonie mobile ne se sont pas fait attendre, couvrant de leurs réseaux très rapidement toutes les régions. Bien que les coûts de l’équipement et de la communication mobile soient plus élevés que ceux pratiqués par le système de téléphonie fixe, portable enregistre un succès qui dépasse toutes les prévisions les plus optimistes. Un appareil bureaucratique lourd et corrompu au niveau des services de télécommunication (dans une logique de contrôle, hyper-centralisé, hérité de l’ancien régime) et l’absence dans tout le milieu rural d’équipements de communication moderne, expliquent en grande partie ce succès. Exclue du réseau de la téléphonie fixe, la Roumanie profonde s’aperçoit soudainement qu’elle peut entrer en communication et dans la modernité grâce au téléphone mobile. Une société pauvre et pas du tout ciblée initialement par les stratégies de management commence à s’intéresser aux équipements mobiles pour finalement devenir le plus important consommateur. L’importance ne se juge pas en nombre d’unités consommées, mais en nombre d’utilisateurs. L’abonnement est rare, la pratique courante étant de fonctionner avec un système à la carte. À l’évidence, la logique qui opère est l’ouverture au contact, la possibilité d’être joignable, de pouvoir appeler en situation d’urgence. Pour qu’une telle stratégie puisse se mettre en oeuvre, l’acquisition de l’instrument est nécessaire au préalable. Les migrants, profitant des promotions diverses proposées dans les pays d’accueil, ont été les premiers en Roumanie à doter leur famille d’un cellulaire décodé au préalable. Un nombre réduit de migrants, parmi les plus entrepreneurs d’entre eux, a compris l’enjeu d’un marché parallèle à celui des opérateurs officiels, et l’a développé et orienté vers les consommateurs de la ville en leur offrant un produit similaire à celui qui se trouve dans les boutiques, mais deux fois moins cher.

Les bisnitzari [les entrepreneurs de rue, trafiquants, en roumain, ndlr] venaient collecter des téléphones en promotion et ils les revendaient après en Roumanie,où ils les décodaient au préalable ; nous ici [à Paris] avons gagné trente à quarante francs pour chaque téléphone, plus la carte téléphonique que l’on vendait dans la communauté ou aux puces de Montreuil pour quarante à cinquante francs. Il y a eu des gens qui collectaient jusqu’à cent téléphones par semaine ; soit ils les achetaient directement au dépôt, soit un par un dans différentes boutiques. Cela marchait dans certaines boutiques où les vendeurs ne comprenaient pas grand-chose à nos papiers. Les bisnitzari sillonnaient les endroits où tu vendais les journaux (devant les Postes, les supermarchés, aux carrefours), ou ils venaient directement dans les squats, et ils te demandaient de leur trouver d’autres machines, ou te proposaient d’acheter la tienne, au prix du neuf. Une fois, j’ai collecté quatre cents à cinq cents téléphones, par un réseau d’Arabes qui les achetaient directement au dépôt. Les bisnitzari les envoyaient ensuite par petites voitures dans le pays, et faisaient suivre leurs emballages séparément par camions, avec les gens de chez nous qui travaillaient dans le transport…

Reconsidérer les mécanismes d’intégration sociale

Pour comprendre le mécanisme de ce système, il faudrait corréler ce commerce à une série d’activités de collectes antérieures, menées par certains migrants roumains pendant leurs séjours à l’étranger. Nous avons déjà montré, dans d’autres études [5], qu’en France, certains migrants roumains, en vue de se procurer rapidement des ressources financières, pratiquent entre la France et la Roumanie une circulation migratoire basée économiquement sur un système de collectes. Il peut s’agir du commerce de vieux vêtements, de pneus usés, ou de différents objets ménagers jetés dans la rue ou, simplement, d’une collecte directe d’argent : à commencer par la mendicité, le lavage de pare-brise, la vente de journaux de rue, la revente de tickets de métro, la musique dans la rue, et autres activités plus ou moins licites. Mais, si on enlève cette spécificité roumaine, on constate que la carrière commerciale de ces entrepreneurs sans entreprise [6] intègre une tendance globale dans le champ des migrations internationales. De plus en plus de migrants savent profiter de leur mobilité transfrontalière et transformer une habilité relationnelle en une compétence productive et économiquement efficace.

Le téléphone mobile a apporté un assouplissement incontestable des contraintes spécifiques rencontrées par une population migrante sans papiers et souvent sans domicile fixe. Son accès généralisé est devenu particulièrement significatif. Dans les sociétés d’accueil, ce support technique a généré l’apparition de différents mécanismes d’intégration sociale spontanés, multiples et individuels qui ont suppléé d’une manière informelle au dispositif de l’intégration institutionnelle. D’autre part, grâce aux systèmes mobiles, ces personnes qui se trouvent loin de leur famille ont non seulement réussi à rester en contact périodiquement avec leur environnement d’origine, mais aussi ont pu contribuer aux décisions et participer à distance aux événements familiaux. Les questions d’intégration – qui préoccupent aussi bien les autorités que le monde académique – devront être reconsidérées dans le contexte spécifique de cette réalité : s’assimiler à un monde parallèle, résister, s’adapter et finalement réussir là où les politiques migratoires ne leur faisaient pas de place. Hier : immigrer et couper les racines ; aujourd’hui : circuler et garder le contact. Cette évolution semble marquer un nouvel âge dans l’histoire des migrations.

Publié dans Hommes et Migrations, n°1240, 2002, pp. 66-81. http://www.hommes-et-migrations.fr/archives/2002/1240/1240.html

Notes

[1] Madjiguène Cissé, Parole de sans-papiers, éditions La Dispute, Paris, 1998

[2] Ibid., p. 107.

[3] Chantal de Gournay, “En attendant les nomades. Téléphonie mobile et modes de vie”, Réseaux, n° 65, mai-juin 1994, p. 23.

[4] Name diffusion : je suis une sans-papiers : Madjiguène Cissé, porte-parole des sans-papiers de Saint-Bernard, Politique la Revue, Synestésie, n° 6.

[5] Dana Diminescu, “L’installation dans la mobilité : les savoir-faire migratoires des Roumains”, Migrations Société, vol.13, n° 74, 2001, pp. 107-117

[6] Pour reprendre une formule lancée par Granovetter (“The economics sociology of firms and entrepreneurs” in Alejandro Portes (éd.), The economic sociology of immigration, RSF, New York, 1995, pp. 128-165) et rempli de sens par les études sur les activités marchandes informelles et les réseaux de migrants transfrontaliers, dirigée par Michel Peraldi à LA MMSH Aix-en-Provence (Cabas et containers, Maisonneuve & Larose, Paris, 2001).