jeudi, juillet 20, 2006

Décision du Conseil constitutionnel sur la loi Sarkozy sur l'immigration et l'intégration

Décision n° 2006-539 DC - 20 juillet 2006

Loi relative à l'immigration et à l'intégration
Source : Cahiers du Conseil Constitutionnel, n°21


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Définitivement adoptée le 30 juin 2006 (dernier jour de la session ordinaire), le Gouvernement ayant demandé l'urgence, la loi relative à l'immigration et à l'intégration entend compléter de façon substantielle la pourtant récente loi du 26 novembre 2003.

Elle a fait l'objet de deux recours, rédigés dans les mêmes termes, présentés respectivement par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs.

Le 20 juillet 2006, par sa décision n° 2006-539 DC, le Conseil constitutionnel a rejeté les recours dont l'avaient saisi plus de soixante sénateurs et plus de soixante députés à l'encontre de la loi relative à l'immigration et à l'intégration définitivement adoptée le 30 juin précédent.

Trois séries de dispositions étaient contestées.

1) La suppression de la délivrance automatique d'un titre de séjour à l'étranger ayant résidé habituellement en France depuis plus de dix ans


La loi déférée abroge la disposition qui accordait de plein doit, sauf si sa présence constituait une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " " à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ".

Selon une jurisprudence constante, aucun principe non plus qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d'accès et de séjour sur le territoire national. Seules des exigences constitutionnelles particulières telles que le droit d'asile ou le droit de mener une vie familiale normale peuvent faire obstacle au pouvoir du législateur de revoir, dans un sens plus restrictif, le droit du séjour des étrangers. Or la loi déférée ne remet pas en cause de telles exigences.

2) Les nouvelles dispositions relatives au regroupement familial

Le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions nouvelles relatives au regroupement familial n'étaient pas contraires au droit des étrangers établis de manière stable et régulière en France de mener une vie familiale normale, dès lors qu'elles tendaient à garantir les conditions d'une vie familiale normale, lesquelles s'apprécient en fonction des critères qui prévalent en France, pays d'accueil.

Ainsi :

- Le droit au regroupement familial supposant la stabilité du séjour, il appartient au législateur de fixer la période au terme de laquelle le demandeur peut être considéré comme séjournant de façon stable en France. La durée de dix-huit mois, prévue par l'article 44 de la loi déférée, n'est pas excessive à cet égard (le Conseil avait admis en 1993 une durée de deux ans).

- Comme le prescrit l'article 45, les conditions de logement pourront désormais être appréciées par référence à ce qui est regardé comme normal " pour une famille comparable dans la même région géographique ". Les caractéristiques du logement variant en effet selon les zones géographique (grandes agglomérations, villes moyennes, petites villes, campagnes), les conditions d'habitat conformes à une vie familiale normale en France sont fonction du lieu.

- Le regroupement familial pourra être refusé (même article) lorsque le demandeur ne respecte pas les " principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ". Cette expression doit être entendue comme renvoyant aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale normale en France : monogamie, égalité de l'homme et la femme, respect de l'intégrité physique des enfants et adolescents, respect de la liberté du mariage, assiduité scolaire, respect des différences ethniques et religieuses, acceptation de la règle selon laquelle la France est une République laïque....

- Comme le prévoit l'article 47, l'autorisation de séjour délivrée au conjoint, au titre du regroupent familial, pourra lui être retirée en cas de rupture de la vie commune dans les trois ans suivant sa délivrance. Aucun principe de valeur constitutionnelle ne garantit le maintien ou le renouvellement d'une autorisation lorsque les conditions mises à sa délivrance ne sont plus satisfaites. En fixant à trois ans à compter du regroupement familial cette possibilité de retrait, sauf dans trois cas (maltraitance conjugale, enfants à charge, décès de l'autre conjoint), le législateur s'est borné à définir les conditions, relatives à l'effectivité de la vie commune, du maintien de cette autorisation.


3) La procédure juridictionnelle applicable aux mesures d'éloignement

La loi déférée institue de nouvelles règles de procédure contentieuse devant le tribunal administratif à propos des refus de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination.

Contrairement à ce que soutenaient les requérants, ces dispositions ne modifient pas les règles fixées par le code de la justice administrative s'agissant du principe de collégialité des formations de jugement et des exceptions à ce principe. Manquait donc en fait le grief dénonçant un abandon du principe de la collégialité.

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