jeudi, février 09, 2006

Le gouvernement veut une immigration "choisie"

PARIS (AFP) - Le gouvernement a validé jeudi l'avant-projet de loi de Nicolas Sarkozy sur une immigration "choisie" ou une immigration du travail, un dossier sensible dont Dominique de Villepin n'entend pas laisser le pilotage à son seul ministre de l'Intérieur.

Parmi les mesures phares de ce texte, figure la création d'une nouvelle carte de séjour "talents et compétences" à destination des étrangers hautement qualifiés (scientifiques, informaticiens, artistes...), les plus à même de "participer au développement de l'économie française" ou au "rayonnement de la France dans le monde".

Ce titre de séjour sera valable trois ans et renouvelable, a confirmé le Premier ministre lors d'une conférence de presse à Matignon, à l'issue du 4è Comité interministériel de contrôle de l'immigration (Cici).

"Il faut passer d'une immigration trop longtemps subie à une immigration choisie", a-t-il souligné. "Notre objectif commun est clair: rendre à la France les moyens de contrôler son immigration afin que celle-ci devienne un véritable atout pour notre pays".

Plus concrètement, il s'agit de favoriser une immigration de travail dans les secteurs les plus qualifiés.

Regrettant que "le continent européen reçoit une immigration sous-qualifiée", M. Sarkozy a estimé jeudi, dans une tribune au Figaro, que "la France ne peut pas rester à l'écart des flux mondiaux de l'intelligence et des compétences".

Le texte fait donc aussi la part belle aux "meilleurs" étudiants étrangers, les "plus motivés", qui bénéficieront d'une carte spéciale de séjour en contrepartie d'un engagement à retourner dans leur pays une fois leurs études achevées, afin de ne "pas priver les pays d'origine de leurs élites".

Le gouvernement n'a finalement pas retenu la mise en place, dans son rapport annuel au Parlement, d'objectifs chiffrés prévisionnels de visas et de titres de séjours, préférant pour des raisons de constitutionnalité parler "d'estimations".

Il durcit les conditions d'entrée des migrants non qualifiés, le regroupement familial -possible à partir de deux ans de présence sur le territoire national et non plus un- et renforce la lutte contre les fraudes au mariage binational, avec des conditions plus draconiennes dans l'acquisition de la nationalité française.

Pour pallier le manque de main d'oeuvre dans certains métiers, le gouvernement a également établi "des listes" -"par nature évolutives", a précisé Jean-Louis Borloo- de secteurs "tendus" où les employeurs pourront faire appel à des étrangers: "mécanique, maintenance industrielle, froid, hôtellerie-restauration, travaux publics, infirmières".

Le projet de loi ne vise pas à "mettre en place des quotas", a affirmé M. de Villepin. "Nous ne voulons pas piller les élites" de ces pays, a renchéri M. Sarkozy.

Mais la gauche a dénoncé la "perspective utilitariste" du texte. "On va avoir de bons immigrés bénéficiant de leurs droits et de mauvais immigrés privés des leurs", a accusé le PS.

Ce dossier illustre en outre la concurrence que se livrent les deux hommes forts du gouvernement. M. de Villepin a tenu à saluer "l'implication personnelle de tous les ministres" dans ce texte, n'attribuant à M. Sarkozy -qui lui avait grillé la politesse en en dévoilant dès dimanche dans la presse les grands axes- que le rôle d'une "coordination efficace".

"Le projet de loi sera défendu par Nicolas Sarkozy (...) en liaison avec chacun des ministres dans leurs domaines respectifs: Jean-Louis Borloo pour toute la partie affaires sociales, Pascal Clément pour les affaires judiciaires et bien sûr François Baroin pour ce qui concerne l'Outre-mer", a-t-il insisté.

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